Le quotidien Sud Ouest propose, à l’occasion de la réédition d’un classique, de revenir sur l’origine du béret. Il est quand même étrange de devoir tant s’écharper sur une supposée appartenance, à qui basque, à qui béarnais au lieu de faire de cette coiffe régionale un élément fédérateur d’une appartenance plus large, bien que moins consensuelle, celle de vascon (on se souviendra qu’un ouvrage fondateur du nouveau nationalisme basque se nomme Vasconia, écrit par Federico Krutwig, et qu’y figure une carte de ce territoire d’entre Ebre et Garonne, avec des districts aux noms basquisés, comme une incitation à relever le défi de l’union pour les uns, à justifier une hégémonie pour les autres). Basques ou Gascons, après tout, la dénomination a été commune au début du Moyen Age, et avant encore, tous étaient Aquitani. (source : http://www.sudouest.fr/2016/02/28/le-beret-revient-sur-la-table-2286101-4483.php)
Le béret est-il basque ou béarnais ?
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La réédition du livre du Landais René Cuzacq mettra-t-elle enfin d’accord tout le monde sur l’origine du béret ? Basque ou béarnaise ? Un débat fondamental.
Faut-il porter le béret sur la droite ou sur la gauche ? En avant ou en arrière ? Peu importe. Une seule question compte : le couvre-chef est-il basque ou béarnais ? Le débat fondamental est aujourd’hui tranché. Et c’est un Landais qui met tout le monde d’accord.
Auteur de deux études sur le sujet, en 1941 et 1951, René Cuzacq, en bon Gascon, ne se mouille pas. Selon lui, l’origine est… pyrénéenne ! Sans pour autant dédouaner les Basques et les Béarnais d’avoir activement participé à l’émergence d’un des symboles les plus forts de la France. La réédition de son livre, une bible introuvable depuis plusieurs années (1), permet néanmoins d’en savoir davantage.
Réglons l’essentiel une bonne fois pour toutes. Les métropoles historiques de la fabrication des bérets sont belles et bien béarnaises. Nay et Oloron, suivie, plus tard, de Mirepeix ont permis au département de produire autour d’un million de bérets par an à partir de 1918. Transformés progressivement en usine, les ateliers y employaient beaucoup de main-d’œuvre.
Le concurrent de la casquette
René Cuzacq rappelle que le concurrent de la casquette anglaise passait dans dix-huit mains différentes avant d’être vendu. À Nay, la première unité de production de bérets issue d’une longue tradition textile, remonte à 1830. C’était celle de Prosper Blancq. La situation d’Oloron est, semble-t-il, comparable et assure le lien avec le temps où on y fabriquait des bonnets ronds, rue Labarraque.
Que nous dit René Cuzacq, en revanche, sur la production basque ? Il ne rejoint pas l’idée d’un héritage des guerres carlistes nées de la succession de Ferdinand VII d’Espagne, dès la première moitié du XIXe siècle. « Le béret est une chose pyrénéenne. Il était tricoté à la maison : exactement comme par le berger de la Lande. Si la célébrité du Pays basque lui a donné son nom (venu certainement de Paris avec la réputation grandissante de nos régions), nul doute que des Landes aux Pyrénées, on n’ait de tout temps porté le béret par une tradition continue qui aboutit au béret basque », écrit l’auteur.
Il ne minimise pas, par ailleurs, le rôle des Béarnais, notamment dans la fixation des formes alors que le béret était déjà depuis longtemps la coiffure caractéristique de l’identité du Sud-Ouest.
Premières traces en 1531
D’aucuns le présentaient pourtant comme provenant de Grèce. Les Romains s’en servaient pour se couvrir dans l’amphithéâtre. Les Phéniciens l’auraient apporté au Pays basque. René Cuzacq relève aussi la légende selon laquelle les soldats de Napoléon l’avaient retrouvé chez les Russes de Pologne. « Dans l’histoire du béret, il est difficile de remonter plus que les XVe et XVIe siècle », raconte le Landais. Il cite le témoignage d’un pèlerin de Saint-Jacques à la fin du XVe siècle. Le texte est accompagné d’un dessin où un homme porte une toque noire.
René Cuzacq n’y voit pas la naissance du béret. Mais peut-être bien le début d’une évolution. Même si on retrouve une forme de béret dès 1280 sur le portail de l’église de Bellocq, Cuzacq préfère placer la première trace du mot béret « dans les archives de Bayonne », entre 1531 et 1538. L’inventaire de Pès de Camyade évoque ainsi un béret noir à deux revers. Mais en vérité, les couleurs ont régulièrement changé.
Rouge et bleu
En 1549, la rencontre entre Gramont et le roi de Navarre s’organise en compagnie de « 2 000 vassaux en bérets noirs ». Chose surprenante : les Béarnais avaient participé à la réception en… « bérets rouges » ! En 1660 les matelots des chaloupes qui accueillaient Louis XIV à Bayonne avaient aussi des bonnets rouges. Bien plus tard, en 1788, ces mêmes bérets rouges portés dans la région de Monein poussent le voyageur Arthur Young à faire un lien avec l’Écosse.
À la même période, un régiment fondé par le chevalier basque de Béla porte le béret « bleu de ciel à la Navarraise. » Une couleur reprise dans la « Statistique du département des Basses-Pyrénées » au début du XIXe siècle.
À lire René Cuzacq, on peut en déduire que le noir a fini par s’imposer après 1914, quand le béret a définitivement conquis les cœurs et surtout les têtes. C’est bien en tout cas le gascon qui emploie le terme de « berret », même si « lou capèt » a survécu au temps. René Cuzacq rappelle d’ailleurs que les premières éditions du dictionnaire de l’Académie ignorait totalement le béret.
(1) « Petite histoire du béret basque » aux éditions des régionalismes (11,95 €)