Après des années d’attente, nous allons enfin pouvoir bénéficier de la publication d’un travail que quelques uns connaissaient, pour peu qu’ils aient eu accès aux bibliothèques universitaires contenant ce Graal de la céramologie régionale. Il s’agit de la tant espérée publication de la thèse de la médiéviste Anne Berdoy. Jusqu’ici, nous connaissions tous la thèse sous cette présentation bibliographique : Une société artisanale dans son environnement du moyen age à l’époque contemporaine : le centre potier béarnais de Garos et Bouillon. Thèse de doctorat en Histoire Médiévale sous la direction de Jean-Bernard Marquette. – Bordeaux : Université de Bordeaux III, 1997. – 4 vol. – 1 : texte, 349 p. ; 2 : sources, figures, planches photos, tableaux, 166 p. ; 3 : documents, 189 p. ; 4 : annexes, 32 p., fiches.

Mais ça, c’était avant.

Évidemment, une thèse n’est pas un document prévu au départ pour être publié et entreprendre sa publication signifie reprendre son travail universitaire, le réviser en écartant les formulations trop absconses, revoir le plan et parfois actualiser les données. Surtout, il faut prendre garde dans certains cas de ne pas publier trop tardivement une thèse dont le propos n’est plus cohérent au regard de la documentation actuelle. Autant dire que la démarche est compliquée et force le respect lorsqu’elle est entreprise.

Pourquoi la publication de la thèse d’Anne Berdoy constitue un évènement à part entière ? D’abord, il faut présenter son auteur. Anne Berdoy est à la fois archéologue et historienne, spécialisée sur la période médiévale. Ancienne élève du médiéviste de Jean-Bernard Marquette (lui-même élève de Charles Higounet), son domaine de recherche est essentiellement focalisé sur le peuplement de la Gascogne méridionale, principalement sa partie pyrénéenne, avec des thématiques comme les castelnaux, les maisons fortes, les abbayes laïques etc. Ingénieur de recherche, elle est régulièrement missionnée par les collectivités territoriales ou les entreprises agréées d’archéologie préventive.

Nous parlions d’évènement. Oui, cela en est assurément un : le centre potier de Garos et Bouillon (64) a produit en continu plusieurs siècles, entre la fin du Moyen Age et l’orée de la période contemporaine. Loin d’être confidentielle, cette production a inondé les lieux de peuplement du piémont nord-occidental des Pyrénées, débordant allègrement sur les Landes dans leur partie chalossaise. Plus encore, des céramiques de Garos et Bouillon ont traversé l’Atlantique avec migrants ou négociants rejoignant les terres lointaines du Québec. Autant dire qu’une étude détaillée de la production, dans les moyens mis en oeuvre, dans les formes élaborées mais aussi dans sa perspective ethnographique est et restera une référence pour longtemps encore tant ce travail est important pour sa perspective documentaire que pour sa portée exemplaire. Espérons qu’il incite d’autres chercheurs à agir de même (nous avons au moins un autre grand centre potier en tête en écrivant cela…) en s’inspirant du travail d’Anne Berdoy. Bref, en deux mots ACHETEZ LA !

SouscriptionPotieres_Page_1Des potières et leurs maris : histoire d’un artisanat en Béarn (XIIIe-XXe s.), par Anne BERDOY, 356p., éditions MONHELIOS, Pau, 2015.

Voici le sommaire de l’ouvrage :

TABLE DES MATIÈRES
Préface de François FICHET DE CLAIRFONTAINE, inspecteur général des patrimoines.
Avant-propos
Introduction

GAROS ET BOUILLON, DEUX VILLAGES DU SOUBESTRE, EN BÉARN
« Des coteaux affreux et de petits ruisseaux »
« Étant le dit lieu situé et presque le plus près des limites de France »
Mise en valeur et peuplements médiévaux
Une densification progressive de l’habitat durant l’Époque Moderne

CADRES CHRONOLOGIQUE ET GÉOGRAPHIQUE DE L’ACTIVITÉ POTIÈRE
Du Moyen Âge au XXe siècle
« De temps immémorial ». — L’origine médiévale de l’activité potière à Garos et Bouillon. — La permanence de l’activité
potière jusqu’au XXe siècle.
Dans un espace géographiquement restreint
Des ressources naturelles propices aux artisanats de terre cuite. — La dispersion géographique des tuileries.
— Une activité potière strictement limitée à Garos et Bouillon.

LES CARACTÈRES ARCHAÏQUES D’UN ARTISANAT…
Une activité hors de tout cadre spécialisé
Le four, élément clef de l’officine. — Le four à proximité de la maison. — Quand officine et maison se confondent.
— L’absence d’espace spécialisé.
Une activité familiale dominée par les femmes
Chef de famille, ascendants, collatéraux… — Potières et potiers.
Une activité complémentaire au revenu principal de la maison
Le mari de la potière, paysan, charpentier ou cabaretier. — La coexistence d’activités différentes au sein d’une
maison-officine. — La poterie, une activité complémentaire.
Des outils rudimentaires
La tournette. — Un four à chambre unique.

… AUX DIMENSIONS D’UNE PRODUCTION SPÉCIALISÉE
Une concentration de personnes occupées à une même activité
De nombreuses officines. — Le poids de la communauté potière.
Des productions de qualité
Un type de grès…. — … aux avantages reconnus.
Des productions destinées à un marché
La réponse aux attentes des utilisateurs. — La diffusion des productions. — La place prépondérante des topins.

LES RAISONS D’UN PARADOXE
Des techniques adaptées à une production
L’alchimie de la pâte. — L’art du façonnage. — La conduite du feu. — Un état de plénitude technique.
L’équilibre d’un artisanat spécialisé non professionnel
Pour conclure

CATALOGUE DES FORMES IDENTIFIÉES À CE JOUR (XIIIe-XXe siècle)

CATALOGUE DES « MAISONS POTIÈRES » (XVIe-XXe siècle)

Sources
Bibliographie
Index des centres potiers cités
Crédits photographiques

Paru ce jour dans le quotidien Sud Ouest, un article traite de la sortie d’un nouvel ouvrage de l’archéologue basque Jacques Blot. Un évènement en soi! Pour la petite histoire, Jacques Blot, conscient de son âge avançant, a légué au SRA Aquitaine l’ensemble des données archéologiques par lui compilées, le travail de toute une vie. Un blog est par ailleurs consacré à ses repérages : http://jacquesblot.over-blog.com/ Concernant l’article, il nous est difficile d’être d’accord avec le journaliste lorsqu’il prétend que Jacques Blot « est le plus grand archéologue du Pays Basque’ : premièrement, nous ne sommes pas convaincus que Jacques Blot lui-même accepte cette dénomination; secondement, quid des archéologues très actifs sur les terrains basques comme Christian Normand? Morgane Dachary? Benoît Duvivier? Argitxu Beyrie? Gilles Parent? etc. Ils ont apporté beaucoup à la connaissance du passé d’Iparralde et continuent de le faire. L’archéologie, la vraie, celle qui unit aussi bien Jacques Blot que les éminentes personnes précitées, n’est pas un concours de popularité. Bref.

Voici donc l’aperçu de l’article (source : http://www.sudouest.fr/2014/04/19/une-vie-de-fouilles-1529896-4018.php) :

 

 

Une vie de fouilles

L’archéologue des montagnes basques Jacques Blot présente son nouveau livre

Une vie de fouilles
Jacques Blot est le plus grand archéologue du Pays basque, du côté nord des Pyrénées. © Photo

PH B. Lapègue

Arnaud Dejeans

a.dejeans@sudouest.fr

Combien de kilomètres a parcourus Jacques Blot dans les montagnes basques depuis son arrivée à Saint-Jean-de-Luz dans les années 60 ? Difficile à dire. Mais si les chaussures de randonnée de ce médecin à la retraite pouvaient se transformer en machine à remonter le temps, l’archéologue aurait déjà marché sur l’âge de fer, le néolithique et peut-être même rencontré des hommes de Néandertal.

Pendant quarante-cinq ans, l’équivalent d’une période glaciaire à l’échelle d’une vie humaine, le Luzien a parcouru les Pyrénées occidentales de long en large pour faire parler les pierres. « Je suis parti marcher dans la montagne pour draguer », aime à répéter ce passionné d’histoire, (surtout celle qui débute 4 000 ans avant notre ère et qui s’étend jusqu’à la Renaissance). Dans la bouche d’un archéologue, « draguer » signifie creuser le sol.

Une quête sans fin

Toute sa vie, Jacques Blot a traqué des monuments funéraires pour mieux remonter aux racines du Pays basque. Il faut le reconnaître, les archéologues de sa trempe sont des alchimistes capables de transformer les pierres tombales en anecdotes vivantes. « Pour mieux comprendre comment vivaient les bergers de la protohistoire, il faut analyser les structures funéraires qu’on retrouve dans les montagnes. Elles nous donnent une idée de leur mode de vie », résume-t-il.

Selon ses calculs méticuleux, glanés lors de ses prospections et de ses fouilles archéologiques, « le Pays basque nord comptait en 2013, 233 dolmens, 403 cromlechs (pierres levées disposées en cercle), 108 monolithes (un bloc de grande dimension) et 1 054 tertres d’habitat (éminences de terre) ».

Un chiffre en constante évolution : « J’en découvre encore. Il y a quelques années par exemple, je suis retourné au col des Morts (Ilharreko lepoa). Je m’étais souvent arrêté en ce lieu, et n’avais jamais vu le moindre vestige qui puisse justifier une pareille dénomination. Sauf qu’un soir d’été, par soleil couchant, j’ai pu voir sur un petit relief les vestiges de trois tumulus et d’un cromlech. Personne n’avait jamais vu ces tombes protohistoriques. » La source est intarissable.

Une grande partie de l’œuvre de Blot, disciple de Barandiaran et d’Arambourou, est compilée dans l’ouvrage « Archéologie et montagne basque », aujourd’hui épuisé. C’est pour éviter que le travail du Luzien ne tombe dans l’oubli que Philippe Velche, un enseignant de Haute-Vienne, originaire de Bayonne, a réussi à convaincre Jacques Blot de publier un nouveau livre.

Pour le grand public

« Parcours d’un archéologue dans la montagne basque », rédigé sous forme de questions-réponses, est une belle occasion de découvrir les bases de l’archéologie basque. « C’est vrai que les résultats de mes travaux avaient été jusque-là diffusés en majorité dans les publications spécialisées. Ces entretiens pouvaient me permettre de rendre la connaissance accessible au grand public », se réjouit Jacques Blot qui dévoile une des belles anecdotes du livre : « J’ai découvert il y a quelques années qu’une fouille clandestine avait été réalisée. J’ai mené l’enquête auprès des bergers qui m’ont confirmé que c’était un gendarme du coin qui en était l’auteur. Je suis allé porter plainte, en faisant l’innocent, à la brigade où travaillait cet homme. Il a fini par avouer que c’était lui. Pour se faire pardonner, il m’a aidé sur plusieurs chantiers archéologiques par la suite. » Ses belles histoires sont comme les dolmens. Elles méritent de traverser le temps.

Le livre d’entretiens avec Philippe Velche, « Jacques Blot : parcours d’un archéologue dans la montagne basque » (15 euros), éditions Elkar, sera présenté lundi au Biltzar des écrivains de Sare.

Originaire de la province basque de Soule, l’association Ikerzalek fait vivre le patrimoine de son territoire avec gourmandise et pour notre plus grand bonheur. Elle a publié l’automne dernier « 50 ans d’archéologie en Soule, hommage à Pierre Boucher (1909-1997) » et son site regorge d’informations, toujours très documentées et clairement présentées : http://ikerzaleak.wordpress.com/

Ce jour, le quotidien Sud Ouest revient sur l’assemblée générale de l’association qui s’est tenue le 11 avril dernier à Mauléon (source : http://www.sudouest.fr/2014/04/17/ikerzaleak-veut-etendre-son-action-1527934-4273.php) :

Ikerzaleak veut étendre son action

Ikerzaleak veut étendre son action
Dominique Evrard (debout) présente ses travaux sur la collection archéologique Bouchet. © Photo

Photo archives P. B.

L’association Ikerzaleak, qui œuvre dans l’étude, la sauvegarde et la promotion du patrimoine de la province de Soule au Pays basque tenait son assemblée générale, vendredi. Depuis 1985, date de sa création, un travail important de mise en valeur a été accompli par ses bénévoles, tous passionnés.Le président Robert Elissondo a insisté, dans son rapport moral, sur le bilan des activités et leurs évolutions. Trois difficultés sont à surmonter pour que l’association continue son chemin : rajeunissement et renouvellement des membres, se faire davantage reconnaître par les autorités des villages de Soule, se faire connaître au-delà des limites de la Soule par des actions vers le Musée basque de Bayonne et les organismes culturels basques.

« Maule Herria » bilingue

L’année 2013 a été riche avec la mise en place de trois expositions nouvelles, l’édition du livre « 50 ans d’archéologie en Soule » et trois animations à l’extérieur de Mauléon. Toutes les expositions sont bilingues et les livres alternent éditions en basque et en français.

Le bilan financier, présenté par le trésorier René Sentucq, est excellent cette année, grâce à la vente des livres édités par l’association, dont certains, anciens, continuent à se vendre, voir même ont été réédités. Une remarque : l’association était en avance entre 2004 et 2006 quand elle a entrepris la réalisation de l’exposition « la Soule durant la guerre de 1914-1918 », avec lettres de soldats, objets réalisés dans les tranchées et photos. Cette exposition est disponible pour les communes qui voudraient la présenter, à l’occasion du centenaire.

Dans le cadre des études des sites archéologiques en Soule, l’association veut étendre les recherches des dolmens et des camps protohistoriques et pourquoi pas des conférences sur le sujet.

Dernier point important à noter pour 2014 : le livre « Maule Herria » sera bilingue, avec une présentation originale, une partie en français, et en le retournant, la partie en basque. Il s’agit d’un guide historique sur Mauléon-et-Licharre, fait par des Mauléonnais pour les Mauléonnais, mais aussi pour les visiteurs.

Pierre Burger

L’été dernier, nous abordions pour la première fois sur ce blog la question des ressources du net en matière de mise en ligne de publications (nous parlons bien entendu de publications dans des revues spécialisées à comité de lecture). Nous avions évoqué HAL.

Les revues choisissent elles-mêmes depuis quelques années de mettre en ligne leurs numéros, hors les plus récents pour des raisons évidentes. En fait, beaucoup ont fait le constat qu’il est difficile d’arriver à vendre les numéros vieux de quelques années à peine et que donc, il n’était pas préjudiciable d’un strict point de vue commercial de mettre à disposition gratuitement la production scientifique. C’est ainsi qu’un site comme Persee a pu se structurer et connaître une croissance (et une audience) phénoménale, malgré le risque de fermeture qui a un temps pesé sur lui. Histoire, archéologie, histoire de l’art etc. sont au rendez-vous. Il faut malgré tout s’habituer à l’absence dans certains articles des illustrations pour d’obscures raisons de droit d’auteur, mais c’est de plus en plus rare. Concernant les revues, on peut tout aussi bien y trouver les Bulletins de la Société Préhistorique Française que la revue Archéologie du Midi Médiéval ou bien le Bulletin Monumental, Culture et musées etc. Les statistiques d’archivage de novembre 2013 parlent d’elles-mêmes  : 127 collections complètes, 18 276 fascicules, 3 563 464 pages pour un volume de 14,32 Tera octets! Bref, vous l’aurez compris, un site incontournable!

Les réseaux sociaux étant devenus incontournables dans la vie de la plupart des utilisateurs d’internet, il ne manquait plus qu’un réseau social se créé autour de la production scientifique. Sur ce principe, un tel réseau social permettrait d’une part de créer sa propre page mettant en avant ses compétences tout en invitant l’internaute à consulter ses articles, livres ou mémoires (ou au moins des résumés et des extraits) et d’autre part, de se constituer un réseau virtuel au gré des affinités thématiques. C’est sur ce principe qu’est né le réseau international Academia, le site le plus dynamique du moment reposant sur la bonne volonté des inscrits dans la mise à disposition de leur propre production scientifique. Si la plupart des inscrits joue le jeu, d’autres (généralement les étudiants n’ayant pas encore  publié) se contentent d’une page vide : en fait, l’inscription permet de télécharger sur son disque dur les articles mis en ligne. Sans inscription, on se contente de lire en ligne, ce qui est déjà pas mal! L’inscription permet de lister ses propres centres d’intérêt et de bénéficier d’avertissements réguliers concernant les nouvelles mises en lignes en rapport avec eux. Par ailleurs, on peut indiquer vouloir suivre tel ou telle chercheur afin de se tenir au courant des dernières publications par eux mises en ligne. Sur ce réseau, vous y trouverez quelques membres du Club Dubalen. Nous voudrions attirer votre attention sur deux chercheurs régionaux en particulier, ô combien méritant dans leur volonté de diffuser leurs travaux. Dans notre autre post, nous écrivions déjà à propos de la préhistorienne Morgane Dachary. Celle-ci, inscrite l’année dernière sur le réseau Academia a mis en ligne sur sa page pas moins d’une vingtaine d’articles et rapports, en grande partie dédiés à ses recherches menées sur le Magdalénien et la Préhistoire récente dans les Pyrénées occidentales au cours de ces quinze dernières années : https://univ-tlse2.academia.edu/MorganeDachary  Dans le domaine de l’archéologie historique, comment passer à côté de la production d’un chercheur aussi talentueux et sympathique que François Réchin? Maître de conférence hors classe (et hors pair!) en Histoire antique et en archéologie à l’université de Pau et et des Pays de l’Adour, il est spécialisé sur la céramique antique de l’Aquitaine méridionale et plus largement sur les dynamiques du peuplement aquitano-romain du piémont pyrénéen, tant au niveau de la fabrique des cités que de l’implantation et de l’évolution des grands domaines ruraux. Lui aussi propose sur sa page (http://univ-pau.academia.edu/Fran%C3%A7oisR%C3%A9chin) une vingtaine d’articles et nous nourrissons l’espoir qu’un jour sa thèse (La vaisselle commune d’Aquitaine méridionale à l’époque romaine. Contexte céramique, typologie, faciès de consommation.) rejoigne cette liste…

(à suivre)