Le patrimoine bâti rural ancien du Lot-et-Garonne est évoqué dans trois articles parus dans la revue InSitu – Revue des Patrimoines. A noter que deux des articles sont signés Hélène Mousset, conservateur du Patrimoine au Service Régional de l’Archéologie d’Aquitaine (après être passée par le service Inventaire de la DRAC Aquitaine). On découvre dans ces articles quelques clés de lecture du bâti ancien, bien utiles dans une région où la persistance de certains archaïsmes fausse parfois la datation des bâtiments.

Alain BESCHI et Hélène MOUSSET, « La vallée du Lot en Lot-et-Garonne : inventaire topographique », In Situ, 6, 1995 : http://www.insitu.culture.fr/article.xsp?numero=6&id_article=mousset-691

Résumé : La remise en navigation du Lot est à l’origine du projet d’inventaire du patrimoine de la vallée dans sa partie lot-et-garonnaise. L’ampleur du territoire – 12 cantons riverains – et de la perspective historique – du Moyen Age à nos jours – imposaient d’emblée rigueur et objectifs clairs : méthode raisonnée de l’inventaire topographique pour un bilan homogène du patrimoine, fondée sur une enquête systématique du paysage bâti et du mobilier public, sans a priori. Le premier résultat est un catalogue patrimonial sous forme de bases de données. Mais ce corpus documentaire hétérogène et touffu n’est pas une addition de monographies : il peut et doit être interrogé et exploité comme un ensemble apportant une connaissance renouvelée du territoire. Sans prétendre réaliser une synthèse de la totalité des données pour l’ensemble de la vallée, les exemples qui vont suivre illustreront la façon dont le travail d’inventaire apporte réponses et nouvelles interrogations, concernant notamment l’occupation du sol, les paysages et l’architecture de cette partie de l’Agenais. Recherche de l’empreinte d’une époque déterminée, examen de la permanence des paysages bâtis sur la longue durée et observation des traces de mutations et flexions historiques, sont un triple niveau d’analyse attendu dans le cadre d’un inventaire sur un vaste territoire rural.

Hélène Mousset, « L’habitat rural des vallées de la Baïse et du Lot : contexte agraire et paysager », In Situ, 5, 2004 : http://insitu.revues.org/2337

Résumé : Un inventaire du patrimoine a été réalisé dans dix-sept cantons ruraux le long du Lot et de la Baïse. Ce territoire s’étend sur plusieurs secteurs géographiques et se caractérise par un habitat et des paysages variés. L’étude des relations entre l’habitation et les dépendances agricoles a permis d’envisager les systèmes agraires et leur évolution. En outre, l’ensemble des éléments bâtis du territoire ayant été pris en compte, cet inventaire rend possible une approche de l’histoire des paysages ruraux.

Alain Beschi, « Apports, limites et perspectives des méthodes « classiques » de datation du bâti en milieu rural : quelques exemples dans les vallées de la Baïse et du Lot », In Situ, 9, 2008,: http://insitu.revues.org/3587

Résumé : Les campagnes d’inventaire menées ces dernières années en Aquitaine dans les vallées de la Baïse et du Lot ont permis d’éprouver les méthodes généralistes de datation du bâti en milieu rural. Celles-ci nécessitent l’élaboration de critères fiables ainsi que la constitution de référentiels et d’outils typo-chronologiques. Les quelques exemples présentés ici s’attachent à montrer que, au-delà de la collecte de l’information patrimoniale sur un territoire, l’Inventaire, par son jalonnement chronologique, participe à la constitution d’un socle de connaissances sur l’histoire des campagnes.

 

Imaginons : vous roulez sur une départementale du Sud ouest et là, votre regard est attiré par une bien curieuse pierre dressée en bordure de route. Où trouver de l’information sur ce méga caillou? Bien sûr, vous vous précipitez sur internet sitôt revenu chez vous (pour peu que le dit caillou pique votre curiosité suffisamment) où vous trouverez peut-être un peu d’information pas trop mauvaise. Nous vous proposons de franchir le pas et de vous  documenter à l’ancienne : rien ne vaut un bon bouquin! Rassurez-vous, nous n’allons pas lister une dizaine de pavés imposants aux titres somnifères ou des articles dans des revues dont vous n’avez jamais entendu parler.

En 2006 et 2009 sont sortis deux ouvrages sur le sujet des mégalithes (vous savez, les gros cailloux) dans le Sud-ouest :

_ en 2006 : Les premiers hommes du Sud-ouest, Préhistoire dans le Pays Basque, le Béarn, les Landes, par Marc Large, paru chez Éditions Cairn

_ en 2009 : Monuments mégalithiques en Aquitaine, par Alain Beyneix, paru chez Éditions Alan Sutton collection Passé Simple

Les puristes (autrement dit les archéologues et historiens monomaniaques) diront « qui est ce quidam nommé Marc Large qui se permet d’aborder un tel sujet? Que diable!  Alain Beyneix, lui, au moins, est un universitaire! » Les puristes auto-proclamés à qui cette pensée a gnognoté les lobes du cortex, je vous dis « au revoir, allez voir ailleurs si Guilaine y est! » (et je précise que j’admire beaucoup le travail de Jean Guilaine).

Effectivement, dans le paysage de l’archéologie régionale, Alain Beyneix n’est pas un inconnu; pour tout savoir ou presque de sa carrière, rendez-vous sur cette page. Ancien élève de Jean Guilaine et donc, néolithicien en pleine possession de ses moyens, il était logique qu’il s’autorise à publier un ouvrage grand public sur le thème du mégalithisme en Aquitaine. En revanche, qu’en est-il de Marc Large? Je suis sûr que certains d’entre vous le connaissent pour son occupation principale : dessinateur de presse. Il est aussi le créateur du seul festival dédié à la satyre en France Satiradax. Peut-être certains se rappelleront qu’il fut également animateur d’une chronique nature/patrimoine sur feu la chaîne de télévision Alégria. Et pour ceux qui lisent encore des livres (les plus de 30 ans, en gros), ils auront sans doute feuilleté ou acheté (ou trouvé, volé, arraché, pillé, confisqué, emprunté au choix) un des ouvrages publiés par cet auteur aux multiples facettes (Pyrénées sauvages, Landes secrètes, Xan de l’ours etc.). Là encore, les bien-pensants se permettront un « quoi? diantre! lire les œuvres d’un dangereux gauchiste -et mon dieu! peut-être même libertaire!- et agitateur public! Que nenni! » C’est en fait sa curiosité naturelle qu a poussé  Marc Large à mener des recherches sur le Passé de la région, principalement de l’Aquitaine méridionale, nouant des contacts avec différents chercheurs locaux, lisant abondamment et s’imprégnant sur le terrain des différents sites évoqués dans son ouvrage.

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Quels sont les points forts/faibles de chacun de ces ouvrages?

D’abord, l’un et l’autre ont une thématique de départ sensiblement différente. En effet, celui de Beyneix est exclusivement dédié aux mégalithes alors que celui de Large se veut une synthèse grand public sur le peuplement préhistorique du sud de l’Aquitaine. L’un et l’autre font se succéder des notices sur une sélection de sites. En guise de préambule, les deux auteurs font un point sur la thématique :

_ Beyneix contextualise en une dizaine de pages le phénomène mégalithique, pose des jalons chronologiques et typologiques et livre quelques anecdotes liées aux traditions locales et aux croyances populaires (d’autres diraient du folklore).

_ Large retrace en une vingtaine de pages les grandes étapes du peuplement ancien, de manière simple et cohérente. Cette synthèse se termine par le mégalithisme et une chronologie détaillée (et une photo de l’auteur devant une restitution de mammouth!).

Concernant le choix des sites, on constate immédiatement une différence majeure : la zone géographique envisagée par l’un et l’autre fait que le nombre de sites pour l’Aquitaine méridionale est plus important dans l’ouvrage de Marc Large. En effet, celui de Beyneix prend en compte l’Aquitaine administrative et donc des départements comme la Dordogne, la Gironde et le Lot-et-Garonne là où Large se limite aux seules Landes et Pyrénées-Atlantiques.

L’un et l’autre illustrent abondamment leur ouvrage de photographies, documents anciens, plans ce qui rend agréable la lecture.

Cela dit, les deux ouvrages n’ont pas la même finalité. Beyneix est un universitaire qui fait oeuvre de vulgarisation; en cela, son ouvrage se lit posément, chez soi ou dans le train. Il est là pour informer. Celui de Marc Large surprend par son format : petit et étroit. C’est le premier indice. Avant le préambule, on peut lire une mise au point sur la conduite à tenir sur les sites (notamment en prévention des fouilles illicites/pillages) accompagnée d’extraits du Code du Patrimoine. Deuxième indice. Enfin, chaque notice de site s’accompagne d’une feuille de route détaillée permettant de se rendre facilement sur les lieux évoquées. Dernier indice. Elle est là la différence majeure : Marc Large, fidèle à sa passion pour les randonnées et la découverte de lieux magnifiques et rares, informe pour mieux inviter à la rencontre avec le Passé. C’est un ouvrage sur le partage et l’émotion, tout en incitant à tutoyer les racines de l’humanité sur le terrain.

Il ressort que les deux ouvrages sont au final complémentaires, agréables à lire et porteurs d’informations intéressantes et justes. Il est cependant dommage que celui d’Alain Beyneix affiche un prix de 21€, alors que celui de Marc Large est vendu à 16, prix qui aurait dû être aussi celui de Beyneix, l’ouvrage n’atteignant pas 100 pages. Cela dit, ces deux ouvrages peuvent désormais être achetés neufs à un prix modique sur Amazon : celui de Beyneix à moins de 10€ et celui de Large à moins de 5€.

Pour terminer, il existe un article consacré au mégalithisme dans le seul département des Landes. Publié par Jean-Claude Merlet dans le Bulletin de la Société de Borda en 2009 sous le titre Le mégalithisme dans les Landes, il est téléchargeable sur le site Archeolandes.

Du 24 au 26 mai 2013 aura lieu à l’auditorium du Musée d’Aquitaine un colloque intitulé Recherches récentes sur l’Antiquité tardive en Aquitaine. On y retrouvera les principaux spécialistes de la région pour cette période. Les données de l’archéologie programmée, universitaire, y côtoieront celles de l’archéologie préventive. Voici le programme :

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Félix Arnaudin (1844-1921), pudiquement qualifié de « folkloriste » dans les notices biographiques concernées à ce landais de Labouheyre magnifiquement ignoré par les dictionnaires nationaux (qui en revanche répertorient des sportifs aux biens éphémères carrières et à la valeur ajoutée pour le progrès d’une société proche de zéro) est en réalité tout autant voire davantage ethnologue, historien et photographe prolifique. C’est ce dernier aspect, un bien encombrant héritage au demeurant fait de milliers de plaques photographiques en verre, qui a justifié son entrée dans la désormais incontournable Base Joconde, base de données patrimoniale du Ministère de la Culture et de la Communication. Pour profiter pleinement de cela, rendez-vous sur cette page : http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/pres.htm et tapez dans le moteur de recherche « Arnaudin » en prenant garde de cliquer sur la sélection « avec image ».

Qu’y découvre-t-on? Bien plus que les seules photos de lande, de bergers ou de maisons, il y a aussi le patrimoine naturel, arbres, lagunes, bosquets de feuillus ou lointaines pinèdes. Il y a aussi ces vallées de ruisseaux ou rivières, dont le relief tranche avec l’absence d’accidents de terrain des photos de landes, à la ligne d’horizon impeccable, rectiligne. Il y a également ces bourgs, en pleine révolution industrielle, dont on ressent le frémissement utilitariste propre à ce temps de découverte du capitalisme forestier. Et surtout, il y a ces clichés de bâtiments disparus, moulins, maisons, granges, églises ou chapelles, que le photographe Joël Le Fur a parfois ressuscité le temps d’un livre consacré au travail d’Arnaudin

Nous exprimerons cependant un regret majeur : que ces photos ne bénéficient pas d’une taille plus importante dans leur mise en ligne, excluant ainsi toute possibilité d’examiner attentivement certains détails. Le travail de numérisation ayant été réalisé par le Musée d’Aquitaine, peut-être s’agit-il là d’une limite technique de la machine utilisée ou bien une contrainte imposée par les gestionnaires de la Base Joconde. Nous espérons au moins que ce n’est pas une bête histoire de droits de reproduction, ces images étant théoriquement dans le domaine public à présent, et leur enseignement, d’une certaine manière, universel (transformation des paysages, gens d’hier dans leur simplicité, travail désintéressé de l’auteur soucieux d’accorder une postérité à un terroir dénigré et à ses acteurs).

Bon voyage dans le temps!

Maison Aliot - Ychoux (Landes).

Des outils en silex sont de retour en Chalosse

Christian Normand, archéologue.

Christian Normand, archéologue. (photo G. S.)

Ce dernier week-end du mois de mars, Christian Normand, archéologue au Service régional d’archéologie d’Aquitaine, se rendait à la Maison de la Dame de Brassempouy pour exposer des outils en silex de Chalosse découverts sur le site archéologique d’Isturitz au Pays basque.

En effet, les hommes préhistoriques étaient nomades et ils ont semé dans leur sillage différents objets, et notamment des outils de silex. Or, il est possible de connaître l’origine géographique du silex. Cette thématique fait l’objet d’une exposition intitulée « Des silex et des hommes », présentée à la Maison de la Dame jusqu’à la fin de la saison touristique 2013.

D’Ariège et d’EspagneChristian Normand fut pendant longtemps responsable du chantier de fouilles d’Isturitz, et a pu y découvrir des outils aux origines landaises. Avec l’aimable autorisation de l’association Gaztelu, ces pièces viennent rejoindre d’autres outils en silex issu des gîtes de matière première de Chalosse et découverts dans d’autres sites des alentours.

Plus surprenant, des pièces en silex de Chalosse découvertes en Ariège et même en Espagne viendront prochainement rejoindre ces derniers, posant la question des territoires connus et parcourus par nos ancêtres préhistoriques, ou encore de leurs réseaux d’échanges de matière première.

« Des silex et des hommes » : à la Maison de la Dame de Brassempouy visible jusqu’à la fin de la saison touristique 2013. Renseignements au 05 58 89 21 73

Source : Sud-Ouest du 08/04/13 (article de Gérard Suberchicot : http://www.sudouest.fr/2013/04/08/des-outils-en-silex-sont-de-retour-en-chalosse-1017959-3316.php)

Pour en savoir plus sur le silex de Chalosse, il existe une publication sur le sujet :

La caractérisation du silex de Chalosse, par BON F., CHAUVAUD D., DARTIGUEPEYROU S., GARDERE P., MENSAN R., paru en 1996 dans le n°28 de la revue Antiquités Nationales.

Résumé : « Premier état des recherches gîtologiques du silex de Chalosse. Elles indiquent les caractéristiques d’un fond commun chalossais, différenciable des autres formations silicieuses pyrénéennes : des rognons irréguliers de 10-20 cm de diamètre, à grain fin aux couleurs variées. Les caractéristiques des variétées spécifiques permettent de supposer l’existence d’une fréquentation différente par les groupes Aurignaciens et Gravettiens de Brassempouy »

Si quelqu’un possède cet article, je suis preneur d’une version scannée (pierre.eudoxe@yahoo.fr).