L’Encyclopédie Bonneton est une sorte de condensé de tout ce qu’il faut savoir sur chaque département ou région. On y trouve un ensemble d’informations plutôt bien sourcées, avec des contributions de spécialistes des thèmes abordés. Au début des années 2000, une nouvelle version est sortie, colorée, avec une actualisation de pas mal de données. Nous avons souhaité vous présenter l’ouvrage dédié aux Landes, du moins, sa première partie : Histoire et Histoire de l’Art.

Aux commandes, plusieurs pilotes sont connus dans le paysage universitaire régional ou les différentes sociétés savantes : Bénédicte Boyrie-Fénié (spécialiste de linguistique d’oc et de toponymie), Jean Tucoo-Chala (ancien conservateur de l’écomusée de Marquèze), Francis Dupuy (sociologue spécialiste des relations sociales de la Grande Lande au XIXe siècle), Jean-Pierre Lescarret (spécialiste de la société traditionnelle de la Grande Lande), Bernard Traimond (sociologue spécialiste de la société landaise) etc.

Nous vous conseillons vivement d’acquérir cet ouvrage, dont voici un extrait.

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Outre l’investiture prochaine d’Arnaud Littardi comme directeur de la DRAC Aquitaine, nous tenions surtout à saluer la nomination à la tête du Service Régional de l’Archéologie de Nathalie Fourment.

Conservateur du Patrimoine, elle travaillait déjà dans le Service depuis quelques années. Préhistorienne de formation, sa thèse, soutenue en 2002 à l’Université de Toulouse 2, était intitulée « La question des sols et niveaux d’habitat du Paléolithique supérieur au Mésolithique : développement d’approches méthodologiques pour l’analyse spatiale de quatre sites entre Massif central et Pyrénées » (dir. : Michel Barbaza). Elle succède à Dany Barraud, présent à ce poste depuis le début des années 90.

Pour en savoir plus sur Dany Barraud, un homme qui aura profondément marqué le paysage archéologique de l’Aquitaine , nous vous conseillons l’article élogieux que lui a consacré le quotidien Sud Ouest le 29 décembre 2012 :

Par Jacques Ripoche

 

De Coutras à Cussac, les émotions du conservateur

Dany Barraud, conservateur régional depuis vingt ans, quitte Bordeaux pour Paris. Natif de Coutras (33), il avait commencé sa carrière chez lui en fouillant une nécropole.

Le Girondin Dany Barraud va travailler à la préparation de la loi Filippetti sur le patrimoine.

Le Girondin Dany Barraud va travailler à la préparation de la loi Filippetti sur le patrimoine. (Photo Thierry David)

Dany Barraud, 57 ans, rejoint, en qualité d’inspecteur, la Direction générale du patrimoine au ministère de la Culture. Désormais chargé du quart ouest de la France, il va également travailler à la préparation de la loi Filippetti sur le patrimoine, ainsi qu’au livre blanc sur l’archéologie. À l’heure de son départ, retour sur une longue et riche carrière dans la région. Morceaux choisis.

1 Les grandes émotions

« Elles sont nombreuses. La première remonte à 1977. Avec quelques copains, nous avions fondé le Groupement de recherches historiques et archéologiques de Coutras (33), ma commune d’origine. La fouille de la nécropole autour de l’église locale a révélé des sépultures du VIe siècle. Intactes. Les bijoux sont aujourd’hui exposés au musée d’Aquitaine.

Par la suite, en tant que vacataire, j’ai participé aux fouilles de l’îlot Saint-Christoly, à Bordeaux. Un chantier extraordinaire : on y a retrouvé les vestiges de l’ancien port du IVe siècle, avec ses quais en bois et ses entrepôts bien conservés, sur plusieurs niveaux. Je ne peux pas oublier non plus la mise au jour d’une grande ville romaine au cœur du Médoc, à Saint-Germain-d’Esteuil. Les fouilles de la place Camille-Jullian à Bordeaux (1989-1990) sont aussi un souvenir marquant. Elles ont livré les vestiges de la vie de tout un quartier, du Ier siècle jusqu’à l’époque médiévale. Le chantier était totalement ouvert, très suivi par « Sud Ouest » : Patrick Espagnet y avait consacré une douzaine de pages. Un livre sur ces fouilles vient de sortir (1). Mais ma très grande émotion, en tant que conservateur, reste évidemment la découverte, en 2000, de la grotte de Cussac (24) par le spéléologue Marc Delluc : le « Lascaux de la gravure », un site d’un intérêt scientifique mondial majeur, avec des squelettes à l’intérieur, toujours étudié par le professeur Jacques Jaubert. Ça fait quelque chose de pénétrer dans un lieu où personne n’était entré depuis vingt mille ans (2) ! »

2 Des fouilles pas toujours comprises

« On fait facilement à l’archéologie le procès de retarder les chantiers et donc de coûter de l’argent aux promoteurs. Les gens pensent que nous voulons tout fouiller. Ça n’est pas vrai. Nous recevons environ 2 000 dossiers d’urbanisme par an : nous en retenons une centaine, et seule une quarantaine font l’objet de fouilles préventives. Si on travaille bien en amont avec les aménageurs, il n’y a pas de retard. Parfois, cela peut être assez conflictuel. Trouvant que le chantier de la déviation sud de Bergerac (24) n’avançait pas assez vite, le député-maire de l’époque, Daniel Garrigue, avait déposé un amendement parlementaire pour faire modifier la loi sur les fouilles préventives. Le problème était que le tracé, sur le plateau de Pécharmant, recoupait un très riche site du paléolithique. Le Bergeracois, c’était la Ruhr de la préhistoire ! Mais le plus souvent ça se passe bien. Par exemple, en accord avec le promoteur, il n’y aura pas de parking souterrain sous l’îlot « Sud Ouest » (10 000 mètres carrés), au cœur de Bordeaux. Sinon, on aurait détruit le bassin portuaire gaulois et romain de la ville. Il restera enterré. J’ajoute que nous travaillons plutôt bien avec les maires en zone rurale. Car l’archéologie, pour eux, présente aussi un enjeu économique. »

3 Ce qu’il reste à faire

« On peut toujours espérer d’autres grottes ! Mais le grand chantier à venir est celui des deux LGV sud en direction de Toulouse et de l’Espagne, si elles se font : 400 kilomètres de tracé dans des secteurs archéologiquement plus sensibles que pour l’autoroute A 65. On envisage de 80 à 100 fouilles portant sur toutes les époques possibles d’occupation humaine. Par ailleurs, si l’on commence à avoir une vision assez précise du Bordeaux antique, le forum, qui était le lieu de la vie politique, reste à découvrir.

La monumentale porte de Mars, qui marquait l’entrée principale de Périgueux du temps des Romains, n’a pas encore été dégagée. On aimerait bien savoir aussi ce qu’il y a derrière les remparts antiques de Bayonne. Bref, la matière ne manque pas. »

4 Des techniques qui évoluent

« Depuis près de quarante ans que je m’intéresse à l’archéologie, les techniques ont considérablement évolué. Par exemple, à partir de graines, on peut aujourd’hui reconstituer des paysages. La génétique offre de nouvelles opportunités. Le géoradar permet une prospection toujours plus précise. Il existe trois laboratoires d’excellence à Bordeaux, dont la compétence est reconnue internationalement. La législation aussi a bougé : les lois de 2001 et de 2003, la création de l’Inrap (3) nous ont donné les moyens de travailler. Le comportement du public a également changé. Quand nous avons ouvert les sarcophages à Coutras, en 1977, les gens étaient curieux de voir ça.

Aujourd’hui, on nous reproche facilement de ne pas respecter les morts. Pourtant, nous prenons grand soin des restes étudiés et leur donnons une nouvelle sépulture. En réalité, les fouilles sauvent les restes humains de la pelle mécanique. Nous devons aussi être très vigilants face au pillage, qui a déjà donné lieu à des condamnations en Dordogne et dans les Pyrénées-Atlantiques. »

(1) « Un quartier de Bordeaux du Ier au VIIIe siècle », sous la direction de Louis Maurin, éd. Ausonius, 436 p., 20 €. (2) La grotte de Cussac, en Dordogne, est et restera fermée au public. Son relevé numérique est en cours. (3) Institut national de recherches archéologiques préventives.

Dans le cadre de l’hommage à la FHSO tel qu’évoqué dans notre blog précédemment, nous vous proposons de lire quelques contributions tirées de Les Landes, forêt, thermalisme, actes du XLe Congrès d’Etudes Régionales tenu à Dax les 3, 4 et 5 avril 1987, publiés en 1989 :

– Auguste, la Gaule et les routes d’Aquitaine : la voie « directe » de Dax à Bordeaux, par J. P Bost et B. Boyrie-Fenié, p. 13
Brassempouy : état de la question en 1987, par H. Delporte, p. 21
La collection Schmitt à Mont-de-Marsan, par A. Coffyn, p. 29
Deux amphores de M. Porcius trouvées à Dax, par B. Watier, p. 37
Fouilles subaquatiques du lac de Sanguinet. Le site protohistorique de l’Estey du large, par B. Maurin, B. Dubos, R. Lalanne, p. 57
Apport de l’archéologie aérienne à l’étude des nécropoles tumulaires des Chalosses, par F. Didierjean, p. 73
Réexamen des monnaies des Tarusates, par J. C. Hebert, p. 83

Imaginons : vous roulez sur une départementale du Sud ouest et là, votre regard est attiré par une bien curieuse pierre dressée en bordure de route. Où trouver de l’information sur ce méga caillou? Bien sûr, vous vous précipitez sur internet sitôt revenu chez vous (pour peu que le dit caillou pique votre curiosité suffisamment) où vous trouverez peut-être un peu d’information pas trop mauvaise. Nous vous proposons de franchir le pas et de vous  documenter à l’ancienne : rien ne vaut un bon bouquin! Rassurez-vous, nous n’allons pas lister une dizaine de pavés imposants aux titres somnifères ou des articles dans des revues dont vous n’avez jamais entendu parler.

En 2006 et 2009 sont sortis deux ouvrages sur le sujet des mégalithes (vous savez, les gros cailloux) dans le Sud-ouest :

_ en 2006 : Les premiers hommes du Sud-ouest, Préhistoire dans le Pays Basque, le Béarn, les Landes, par Marc Large, paru chez Éditions Cairn

_ en 2009 : Monuments mégalithiques en Aquitaine, par Alain Beyneix, paru chez Éditions Alan Sutton collection Passé Simple

Les puristes (autrement dit les archéologues et historiens monomaniaques) diront « qui est ce quidam nommé Marc Large qui se permet d’aborder un tel sujet? Que diable!  Alain Beyneix, lui, au moins, est un universitaire! » Les puristes auto-proclamés à qui cette pensée a gnognoté les lobes du cortex, je vous dis « au revoir, allez voir ailleurs si Guilaine y est! » (et je précise que j’admire beaucoup le travail de Jean Guilaine).

Effectivement, dans le paysage de l’archéologie régionale, Alain Beyneix n’est pas un inconnu; pour tout savoir ou presque de sa carrière, rendez-vous sur cette page. Ancien élève de Jean Guilaine et donc, néolithicien en pleine possession de ses moyens, il était logique qu’il s’autorise à publier un ouvrage grand public sur le thème du mégalithisme en Aquitaine. En revanche, qu’en est-il de Marc Large? Je suis sûr que certains d’entre vous le connaissent pour son occupation principale : dessinateur de presse. Il est aussi le créateur du seul festival dédié à la satyre en France Satiradax. Peut-être certains se rappelleront qu’il fut également animateur d’une chronique nature/patrimoine sur feu la chaîne de télévision Alégria. Et pour ceux qui lisent encore des livres (les plus de 30 ans, en gros), ils auront sans doute feuilleté ou acheté (ou trouvé, volé, arraché, pillé, confisqué, emprunté au choix) un des ouvrages publiés par cet auteur aux multiples facettes (Pyrénées sauvages, Landes secrètes, Xan de l’ours etc.). Là encore, les bien-pensants se permettront un « quoi? diantre! lire les œuvres d’un dangereux gauchiste -et mon dieu! peut-être même libertaire!- et agitateur public! Que nenni! » C’est en fait sa curiosité naturelle qu a poussé  Marc Large à mener des recherches sur le Passé de la région, principalement de l’Aquitaine méridionale, nouant des contacts avec différents chercheurs locaux, lisant abondamment et s’imprégnant sur le terrain des différents sites évoqués dans son ouvrage.

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Quels sont les points forts/faibles de chacun de ces ouvrages?

D’abord, l’un et l’autre ont une thématique de départ sensiblement différente. En effet, celui de Beyneix est exclusivement dédié aux mégalithes alors que celui de Large se veut une synthèse grand public sur le peuplement préhistorique du sud de l’Aquitaine. L’un et l’autre font se succéder des notices sur une sélection de sites. En guise de préambule, les deux auteurs font un point sur la thématique :

_ Beyneix contextualise en une dizaine de pages le phénomène mégalithique, pose des jalons chronologiques et typologiques et livre quelques anecdotes liées aux traditions locales et aux croyances populaires (d’autres diraient du folklore).

_ Large retrace en une vingtaine de pages les grandes étapes du peuplement ancien, de manière simple et cohérente. Cette synthèse se termine par le mégalithisme et une chronologie détaillée (et une photo de l’auteur devant une restitution de mammouth!).

Concernant le choix des sites, on constate immédiatement une différence majeure : la zone géographique envisagée par l’un et l’autre fait que le nombre de sites pour l’Aquitaine méridionale est plus important dans l’ouvrage de Marc Large. En effet, celui de Beyneix prend en compte l’Aquitaine administrative et donc des départements comme la Dordogne, la Gironde et le Lot-et-Garonne là où Large se limite aux seules Landes et Pyrénées-Atlantiques.

L’un et l’autre illustrent abondamment leur ouvrage de photographies, documents anciens, plans ce qui rend agréable la lecture.

Cela dit, les deux ouvrages n’ont pas la même finalité. Beyneix est un universitaire qui fait oeuvre de vulgarisation; en cela, son ouvrage se lit posément, chez soi ou dans le train. Il est là pour informer. Celui de Marc Large surprend par son format : petit et étroit. C’est le premier indice. Avant le préambule, on peut lire une mise au point sur la conduite à tenir sur les sites (notamment en prévention des fouilles illicites/pillages) accompagnée d’extraits du Code du Patrimoine. Deuxième indice. Enfin, chaque notice de site s’accompagne d’une feuille de route détaillée permettant de se rendre facilement sur les lieux évoquées. Dernier indice. Elle est là la différence majeure : Marc Large, fidèle à sa passion pour les randonnées et la découverte de lieux magnifiques et rares, informe pour mieux inviter à la rencontre avec le Passé. C’est un ouvrage sur le partage et l’émotion, tout en incitant à tutoyer les racines de l’humanité sur le terrain.

Il ressort que les deux ouvrages sont au final complémentaires, agréables à lire et porteurs d’informations intéressantes et justes. Il est cependant dommage que celui d’Alain Beyneix affiche un prix de 21€, alors que celui de Marc Large est vendu à 16, prix qui aurait dû être aussi celui de Beyneix, l’ouvrage n’atteignant pas 100 pages. Cela dit, ces deux ouvrages peuvent désormais être achetés neufs à un prix modique sur Amazon : celui de Beyneix à moins de 10€ et celui de Large à moins de 5€.

Pour terminer, il existe un article consacré au mégalithisme dans le seul département des Landes. Publié par Jean-Claude Merlet dans le Bulletin de la Société de Borda en 2009 sous le titre Le mégalithisme dans les Landes, il est téléchargeable sur le site Archeolandes.

A l’occasion de la réalisation de l’exposition Six pieds sous terre, il y a 3000 ans : l’Age du Fer dans les Landes de Gascogne, une restitution 3D d’une nécropole protohistorique avait été rendue possible par l’étude approfondie de données de fouilles anciennes (fouilles de Bertrand Peyneau à Mios au début du XXe siècle) croisées avec des repérages de terrain récents (Marie Bilbao et Hervé Barrouquère). Menée par la plateforme 3D Archéotransfert, cette restitution était diffusée en continu dans l’exposition précédemment citée. Avec l’accord des commissaires de cette exposition, nous vous proposons de visionner ce travail unique jusque là en France pour cette période. La qualité est basse pour une raison évidente de charge du serveur :

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La réalisation d’un tel film permet de questionner la cohérence de certaines réflexions. En l’occurrence,  dans ce cas précis, le questionnement s’est porté à la fois sur le paléoenvironnement de la nécropole et sur les objets des trousseaux funéraires. Une fibule notamment, présentée dans l’exposition,  modèle inédit (même si proche typologiquement d’autres modèles) avait pu être réinterprétée dans sa morphologie originelle et restaurée en fonction grâce à sa modélisation 3D (rappelons que les objets déposés dans les sépultures protohistoriques sont souvent sacrifiés, c’est à dire tordus, parfois pilonnés ou coupés).