Sous les sables, il y a un prieuré et une église

Sous la basilique Notre-Dame de la Fin des terres, il y a une autre église et un prieuré. Les ensablements ont fait monter le niveau du sol au fil des ans.

En ce temps-là, le Médoc était un Finistère mangé par le vent, le sel du large, l’océan, des escouades de sables, des pirates, des envahisseurs, des naufrageurs, des vases, des moustiques et toutes sortes d’autres choses assez terribles. Pour tout dire, on peut louer les Médocains d’avoir gardé la foi de Sainte-Véronique, parce que franchement, sans ça, leur pays aurait dû devenir un vrai désert. Là-bas, certains aiment croire que se trouvait le Noviomagus de Ptolémée, cetteprospère cité antique. Il faudrait leur expliquer que le géographe se fondait sur une erreur de mesure de la circonférence de la Terre. Laissons là cette querelle. Ce qui est sûr, c’est que la première ville, elle est ensevelie.

Une ville naufragée

Une ville comme épave, ça vous place pas mal dans le registre des insolites. Mais en même temps, ce n’est pas très étonnant. Le Médoc des origines n’a rien d’une langue de terre, c’est un archipel de petites îles entre sable et vase, piqué de semblants de gués souvent submergés. Le Médocain étant têtu comme un Breton, il a toujours reconstruit sur ces fondations rien moins que mouvantes. Avec en figure de proue une chapelle dédiée à Sainte-Véronique, témérairement posée sur les sables du rivage. On dit que la sainte femme, qui a essuyé le visage du Christ sur le chemin de croix et épousé Amadour, le saint du Roc, est venue avec de l’argile et du gazon. En vrai, elle a oublié le gazon, c’est Brémontier qui l’a enraciné, mais au XIXe.

Les bénédictins accourent au XIIe. Le bout du monde, n’est pas un lieu rêvé pour se retirer et prier ? Allez, une basilique, un prieuré, de l’huile de coude et la foi du sablier. Il faut que ça tienne, entre les marécages et l’océan parfois tout fou. Poètes ou mystiques, les moines baptisent leur église Notre-Dame de la fin des Terres. Et montent les fondations sur celles de l’oratoire de Sainte-Véronique, en piteux état. Quand Henri III d’Angleterre embarque vers Plymouth au port de Soulac en remontant de Bordeaux, il part d’un port d’estuaire, et non d’un port de mer. Au moins deux kilomètres d’alluvions séparent aujourd’hui le rivage du point de départ de la flotte anglaise… Le trait de côte ? C’est une hampe. Faite de blocs d’argile et de vase qui se déplacent au gré des tempêtes, dessinant des îles, les reliant, les naufrageant. Dire que les moines sont allés construire leur église là dessus… La dune de Lilhan ? Au bord de l’estuaire… Ah oui, un petit coup de maps, on a du mal à y croire, et pourtant…

Prieuré et église ensevelis

Par prosélytisme, passons sur 1622 et les ravages des parpaillots qui ont bien saccagé la basilique et le site, haut lieu du goupillon et voie historique du pèlerinage vers Saint-Jacques. Restons sur les méfaits de la nature. En quelques siècles, les sables accumulés ont fait grimper le niveau du sol de trois mètres, les fenêtres ont dû être transformées en portes et le rez-de-chaussée en crypte. En 1737, la basilique est une île. Et puis il y a les tempêtes. Les descriptions sont terribles, le bruit, le crissement des cristaux de sables, les grincements sordides. Un jour de 1744, après des jours de tempête, portes et fenêtres ne s’ouvrent plus. Entre l’ensablement et l’enfoncement des fondations dans un sol meuble, bientôt n’émerge plus que le clocher, qui devient le phare des marins. Très ennuyeux pour les pèlerins de Compostelle qui traversent l’estuaire à Talmont, et débarquent à Soulac, chez les moines. 1757, il est désormais impossible d’accéder à l’édifice, abandonné. Comme le village alentour. Les habitants fondent alors le Jeune Soulac, prudemment retiré dans les terres, à 2 kilomètres de là. Et construisent une nouvelle église. Pendant un siècle entier, on ne parle plus de cette basilique enfouie sous les sables, ni de son prieuré, ni de la chapelle désormais épave, ni même du village et des dizaines de maisons disparues.

Aucune certitude

Jusqu’aux travaux de Brémontier pour fixer les sables, la loi d’assainissement de 1857 et l’entêtement du cardinal Donnet à sauver l’église et surtout le reliques de Sainte-Véronique. Première messe en 1860. On reconstruit un prieuré, l’autre ayant été définitivement grignoté par les sables. Grosse frayeur encore et enfin dans les années 1920. Cette fois, ce sont les eaux qui menacent l’église de sombrer à nouveau. La messe déménage dans un garage, on installe des pompes. Mais de menace en menace, Notre Dame ne s’écroule jamais. On l’a consolidée une dernière fois, il y a 20 ans, avec des micro-pieux de soutènement. Dix siècles qu’elle tient. Mais on aimerait bien aller grattouiller les sables pour voir ce village épave qui se cache là-dessous…

Pour en savoir plus :Abbé mezeurt « Notre Dame de la Fin des Terres » 1865.

Philippe de bercerol « Notre Dame de la fin des terres ».

RICHARD zéboulon « Soulac en Médoc », Ed. Cairn.

Bruno albert « Un souper en Médoc », Ed. Féret.

Article d’Is. de Montvert-Chaussy paru dans Sud Ouest le 22/07/13. Source : http://www.sudouest.fr/2013/07/22/sous-les-sables-il-y-a-un-prieure-et-une-eglise-1120932-4626.php

Comme le rappelle l’un de nous en commentaire de bas de page, il y a d’autres références incontournables (et en plus en partie disponibles sur la base Gallica), notamment les articles de Bernard Saint-Jours, historien et géographe du littoral gascon, par ailleurs capitaine des douanes (1844-1938). Ils permettent d’éviter certaines erreurs et de tordre le coup à pas mal de légendes locales :
_ État ancien du littoral gascon, 1901, Bulletin de la Société de géographie commerciale de Bordeaux
_ L’Âge des dunes et des étangs de Gascogne, 1901, Bulletin de la Société de géographie commerciale de Bordeaux
_ La propriété des dunes du littoral gascon, 1922-24, Bulletin de la société de Borda
_ La mer et les dunes n’empiétaient pas, 1930
_ Le littoral gascon, 1921
_ Soulac d’après textes et preuves, 1917, Actes de l’Académie des sciences, belles-lettres et art de Bordeaux
_ La Basilique de Soulac inondée? 1918, Revue philomatique. Bordeaux et Sud-ouest,
_ Nos populations n’ont pas eu à fuir devant les sables. Suite de mon plaidoyer pour la réhabilitation de 1.000 kilomètres carrés de sol de France, 1930-1931, Académie des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux.

La Maison de la Dame à la conquête du web

À l’heure des tweets et des QR code, la Maison de la Dame montre encore une fois sa volonté de se développer, en s’affichant de plus en plus sur la toile et mettant ainsi progressivement en place une véritable stratégie de communication Internet.

Alors qu’aujourd’hui, de nombreux vacanciers préparent leur séjour sur le Net, la Maison de la Dame met à disposition de tous, via différents supports web, les actualités et animations prévues pendant la saison estivale. Le site Internet, le blog, la page Facebook et le twitter du musée travaillent de concert dans un seul but : le partage.

Pour ceux qui aiment la préhistoire ou qui veulent en savoir plus sur les manifestations qui se tiendront ces prochaines semaines en Chalosse : sur les réseaux sociaux, rien n’échappe à l’œil aiguisé de la Dame. Articles sur la préhistoire, annonces d’événements divers, petits encarts humoristiques mais aussi jeux, concours… Il y a tout le nécessaire pour se tenir informé.

Bientôt un écran tactileEt ce n’est qu’un début. D’ici peu, un écran tactile sera installé sur le site : il renverra vers le site de la Maison de la Dame et vers celui de l’office de tourisme d’Amou, offrant aux visiteurs une connexion indispensable pour affiner leur programme de vacances. À partir du mois de septembre, un nouveau site sera mis en ligne, dédié entièrement aux écoles souhaitant faire une sortie scolaire à Brassempouy. Chaque animation sera détaillée et téléchargeable sous forme de fiche individuelle pour plus de facilité.

En bref, la Maison de la Dame se donne encore une fois les moyens de faire parler d’elle et d’exporter son image de plus en plus loin.

Article de Gérard Suberchicot paru dans Sud Ouest le 06/08/13. Source : http://www.sudouest.fr/2013/08/06/la-maison-de-la-dame-a-la-conquete-du-web-1134135-3316.php

Il est à préciser que la nouvelle responsable communication du Musée de Brassempouy n’est autre que Marie Bilbao, membre du Centre de Recherches Archéologiques sur les Landes et du Club Dubalen. Son parcours d’archéologue tant dans l’archéologie préventive (INRAP, Hadès) qu’associative ou son expérience dans la médiation (commissariat de l’expo « Six pieds sous terre » à l’écomusée de Marquèze et diverses animations ces 5 dernières années) représentent à n’en pas douter un atout pour le musée de Préhistoire, musée appelé à devenir un lieu incontournable du Patrimoine aquitain, notamment par l’obtention du statut « musée de France ».

Pays basque : les silex racontent le passé

Une équipe d’archéologues a retracé la vie préhistorique. La construction de la clinique peut débuter.

Sous un soleil de plomb, les archéologues effectuent les dernières fouilles et étiquettent leur butin. Leur travail de recherches sur le terrain de la future clinique Capio de Bayonne est terminé, et ils se retirent, laissant le champ libre aux grues et aux pelleteuses des ouvriers qui vont pouvoir commencer la construction du bâtiment.

Après un mois et demi de fouilles, l’équipe de l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) est plutôt satisfaite de sa récolte. Des 400 mètres carrés de terrain passés au peigne fin, ils rapportent plusieurs kilos de silex et de roches taillés par les hommes préhistoriques.

Des silex dont la forme, la disposition et la profondeur dans le sol permettent de reconstituer la vie des hommes de Neandertal. Ils racontent une histoire vieille de plus de quarante mille ans : «Les hommes du Moustérien vivaient en groupes nomades», raconte David Colonge, le responsable Inrap des fouilles, en déballant ses plus beaux silex.

«Ici, ils reconstituaient leur stock d’outils : ils taillaient couteaux et petites haches dans de gros blocs de silex.»

Anomalie

David Colonge pointe du doigt un silex blanc : «Celui-là servait à couper le bois et les articulations animales.» Un autre, moins émoussé : « Celui-là, à racler la chair animale.» Encore un peu, et on connaîtrait le menu du dîner.

Autre certitude : il y a quarante mille ans, contrairement à aujourd’hui, les hommes n’ont pas été séduits par la région au point de s’y installer.

Les traces d’occupation relevées sont trop légères pour des sédentaires : les campements des chasseurs-cueilleurs sont de petite taille, et il n’y a aucune trace durable de feu. Dans les trois terrains fouillés au Prissé, les pièces découvertes se ressemblent – ce qui consolide les hypothèses de mode de vie de ces ancêtres lointains.

Une seule anomalie : la découverte de silex plus récents- datant de vingt mille ans, tout de même- taillés bizarrement.

Si les doutes de l’équipe sont vérifiés, ce serait une première : les fouilles du terrain confirmeraient que des hommes du Solutréen, une période paléolithique, auraient mis les pieds dans la région. «On pourrait affirmer que ces hommes sont passés par ici, ce qu’on ignorait totalement», s’enthousiasme David Colonge.

Transition en douceur

Abandonner le terrain quand on sait qu’il recèle encore beaucoup de surprises n’est pas facile. Pourtant, la transition entre archéologues et ouvriers se fait sans animosité.

Un procédé de bons échanges : les constructeurs ont le droit d’utiliser des terrains remplis de vestiges pour bâtir, à condition, depuis 2008, de laisser à l’Inrap du temps, en amont, pour extraire du sol une partie des richesses du patrimoine.

Article d’Alix Hardy paru dans Sud Ouest le 02/08/13. Source : http://www.sudouest.fr/2013/08/02/les-silex-racontent-le-passe-1131061-4018.php

Dans notre série hommage à la Fédération Historique du Sud-Ouest, nous vous invitons à découvrir quelques contributions tirées de Bazas et le Bazadais : occupation du sol, histoire, art économie,  actes du XIIIe Congrès d’études régionales tenu à Bazas les 7 et 8 mai 1960, publiés en 1961 :

Sur le nom « vasates », par R. Lafon

Le peuplement du bazadais méridional de la Préhistoire à la conquête romaine, par J.-B. Marquette

La nécropole mérovingienne de la place Saint-Martin à Bazas, par L. Cadis et J. Coupry

Châteaux du bazadais et châteaux du sud-ouest gascon de 1250 à 1330, par J. Gardelles

Si vous êtes en train de lire ce blog, c’est qu’en principe, le Patrimoine de votre région vous intéresse -à moins que votre passage ici ne soit lié à un caprice des moteurs de recherches et à une indexation hasardeuse-.

A moins que ce ne soit déjà le cas, nous vous recommandons d’intégrer le réseau associatif des sociétés savantes régionales afin de vous permettre non seulement de vous tenir au courant de la vitalité des recherches locales, mais aussi éventuellement de vous permettre de publier sur un sujet qui vous intéresse.

En Aquitaine, quel que soit le département où vous vous trouvez, il y en aura au moins une pour satisfaire votre curiosité. Wikipédia en dresse une liste non exhaustive : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_soci%C3%A9t%C3%A9s_savantes_d%27histoire_et_d%27arch%C3%A9ologie_en_France

Créée en 1876, la Société de Borda est aujourd’hui forte d’environ 1200 adhérents, soit une des plus importantes du Sud-Ouest. Chaque trimestre, elle publie un bulletin, regroupant des articles richement documentés (illustrations en noir et blanc et en couleur) sur des thématiques aussi diverses que l’Histoire, la Géographie, la Botanique, la Géologie, l’Archéologie, le Folklore etc. en relation avec le département des Landes. Hélas, beaucoup de landais, surtout à Mont-de-Marsan et ses environs, imaginent que la Société de Borda née et basée à Dax, n’est qu’un regroupement d’érudits dacquois vieillissant devisant entre eux du Patrimoine de Dax. Que nenni! Si la Société de Borda est bien née à Dax, la grande majorité des articles publiés ne traitent pas de Dax. De plus, la Société de Borda tient des réunions mensuelles publiques et gratuites un peu partout dans les Landes avec des conférences en relation avec la commune d’accueil ou son terroir proche. Enfin, si effectivement, à l’instar des sociétés savantes en général, la moyenne d’âge des adhérents et élevée, le Président actuel -et une bonne partie des membres du Conseil- a moins de 60 ans. Par ailleurs, des étudiants présentent régulièrement leurs travaux au cours des réunions mensuelles ou assistent en spectateurs à ces dernières.

L’adhésion se fait par paiement d’une cotisation annuelle qui donne droit à réception des bulletins trimestriels. Alors, n’hésitez plus, agissez pour votre Patrimoine et la sauvegarde de la mémoire de votre terroir et adhérez à la Société de Borda!

Lien : http://www.societe-borda.com/

 

Post Scriptum : nous avons rédigé ce billet en réaction d’une certaine manière à des « landais » du pays de Maremne vus dans un reportage récemment sur la chaine M6 (la rediffusion en ligne du reportage : http://www.m6replay.fr/emissions/#/zone-interdite/11305138-invasion-de-touristes-quand-les-habitants-se-revoltent). Ils se prétendaient landais, fiers de leur « identité », rejetant touristes et tout ce qui n’était pas à leurs yeux « landais », n’hésitant pas à dégrader des véhicules ou limitant finalement leur seule vision du Patrimoine local à des vagues et des bouts de plage qu’il faudrait à tout prix défendre contre d’improbables envahisseurs. Nous doutons fort qu’avec une telle optique, ces personnes adhérent un jour à la Société de Borda comme action « positive ». Mais il nous est apparu important de montrer aux lecteurs de ce blog que l’on peut aussi aimer un terroir et agir intelligemment. Les Landes n’ont aucune historicité, c’est un territoire créé de toute pièce arbitrairement à la Révolution. Tout en rejetant toute forme de xénophobie et de localisme, s’il avait été juste d’un point de vue historique de mettre en avant un territoire, ces bien tristes sires auraient été bien avisés de parler éventuellement de Gascogne. Mais quand on voit que les plaques d’immatriculation 32 (Gers) étaient arrachées au même titre que des plaques plus lointaines, on comprend à quel point leur connaissance de l’identité landaise, de l’Histoire de leur terroir est proche du néant. Même le chant qu’ils ont entonné n’était pas l’hymne landais pourtant bien connu dans le département, chanté par les anciens dans les réunions de famille ou à un comptoir de bistrot après une partie de quille ou de belote.