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Dans Sud Ouest Gironde d'aujourd'hui, un florilège d'inepties et une belle incitation au pillage (comme s'il y en avait besoin dans ce coin-là!) :
http://www.sudouest.com/230808/reg_giro … 015380.xml
J'en reparlerai ultérieurement. Si d'ores et déjà quelqu'un veut faire un commentaire, qu'il n'hésite pas!
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"BASSIN D'ARCACHON. --Une histoire vieille de 500 ans raconte qu'une chèvre en or serait enterrée quelque part autour de la «petite mer». Une légende ? Pas si sûr... Partons à sa recherche
A la recherche de la chèvre d'or
:Thibault Raisse
Tout a commencé il y a trois semaines, par une banale discussion avec un commerçant de Lacanau. « Plus personne ne vient ici, me dit-il. A part les habitués, les surfeurs, et ceux qui cherchent le trésor du Porge. » La blague est amusante. Sauf que mon interlocuteur n'a pas l'air de rigoler. Un trésor ? Au Porge ? « A ce qu'il paraît. Mais je n'en sais pas plus. » L'enquête démarre.
Permière étape : contacter les « anciens » du village. Au Porge, deux hommes correspondent au profil. Le premier est l'auteur d'une histoire du Porge en trois volumes. « La chèvre d'or ? Je ne vous dirai rien. Au revoir monsieur. » Ambiance. Le deuxième, bon connaisseur de l'histoire locale, n'est pas beaucoup plus bavard. « J'en ai entendu parler, mais je ne peux pas vous en dire plus. » En désespoir de cause, j'appelle l'office du tourisme. Ouf : « C'est une histoire qui remonte à la Guerre de Cent ans. Pour éviter que les Anglais ne s'en empare, des Porgeais auraient décidé de couler leur réserve d'or sous la forme d'une chèvre, avant de l'enterrer. » Pourquoi cet omerta ? « Parce que certains villageois la cherchent, et ils ne veulent pas que ça se sache. Tentez votre chance du côté de Lège. La légende se raconte aussi là-bas. »
Le trésor des Anglais. A la mairie de Lège, on ne fait pas de mystère autour de la biquette. « Le logo de la ville représente une chèvre. Ce n'est pas un hasard. » Rendez-vous au Canon, chez un auteur de livre d'histoire consacré au Bassin. Ici, la légende est un peu différente de celle du Porge. « Au moment de la bataille de Castillon en 1453, des troupes anglaises auraient coulé le fruit de leurs pillages sous la forme d'une chèvre. Ils l'auraient enterrée quelque part autour du Bassin. » L'homme me fait part de son scepticisme quant à la véracité de l'histoire. Puis ajoute : « Il existe un acte de partage datant de 1807 dans lequel les propriétaires d'un domaine de Biganos évoquent un trésor caché. » Le document disponible aux archives départementales stipule en effet que « s'il venait à se découvrir quelque objet enfoui dans les lieux, le partage en serait fait entre tous les co-partageants ».
Le mystérieux souterrain. Direction Biganos. Je retrouve la trace du domaine en question au lieu-dit du « Comprian ». La gardienne m'interpelle avant même que j'ai eu le temps de sonner. « On nous embête beaucoup avec cette histoire. Des gens sautent par-dessus la clôture pour aller faire des fouilles. Désolée, mais vous n'entrerez pas. » Voyant ma déception, elle me donne le nom d'une figure locale censée pouvoir m'aider. L'homme est très âgé, mais la pioche est bonne. « On dit qu'un passage souterrain relie le puit du domaine de Comprian au castéra (sorte de fortification, ndlr) de Biganos. Il faudrait peut-être aller voir du côté de ce castéra. »
Arrivé aux environs du castéra, j'aperçois un site de fouille archéologique. Les bénévoles m'expliquent que leurs recherches n'ont rien à voir avec une prétendu chèvre en or. A côté d'eux, un homme. C'est un ancien conseiller municipal de la ville. L'histoire de la chèvre, il l'a connaît bien. « Quand j'étais ado, je suis allé voir ce fameux puit au domaine de Comprian. Il était obstrué, mais on distinguait nettement un départ de souterrain. » Cette fois, je me décide à aller voir de près ce fameux castéra. Déception : aucune trace d'une quelconque galerie enfouie sous terre.
Avant de quitter les lieux, je fait un crochet par la forêt de Lamothe situé à proximité. Le vieil homme qui m'avait conseillé d'aller voir le castéra avait également évoqué une fontaine perdue dans les bois, comme possible refuge de la chèvre. Sur place, la fontaine asséchée ressemble à un totem mystique. Un homme passe par là. Il semble chercher quelque chose. Je tente ma chance. « Vous aussi vous cherchez la chèvre d'or ? » « Non, moi je cherche des cèpes. C'est quoi cette histoire de chèvre d'or ? » Je laisse échapper un sourire. « Eh bien, tout a commencé il y a trois semaines, par une banale discussion avec un commerçant de Lacanau… »
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Je pense que l'on ne peut reprocher à l'auteur de cet article les données évoquées, tant il paraît empreint d'une certaine forme de candeur (réelle ou feinte?) à l'égard des autochtones et de leurs histoires (et non Histoire avec un grand H). Ce qui est regrettable, c'est de toujours voir les mêmes absurdités génération après génération : combien de lieux dans le Sud-Ouest ont leur légende sur une chèvre en or enterrée le plus souvent dans une motte féodale? Combien de pillages ont été perpétrés au nom de ces stupides légendes??? Comme le dirait très bien Gilles Kerloc'h, auteur de l'ouvrage "Sur la trace des trésors landais : légendes, traditions, réalités", la chèvre d'or n'a jamais été une chèvre en or, mais une bourse à monnaies en cuir (de chèvre). Il s'en est perdu forcément,il s'en est trouvé aussi. Mais de chèvres, point. Comme par hasard, la Guerre de Cent ans s'en mêle : les anglais étaient dans les légendes locales forcément occupants, forcément pillards, forcément cruels... Euh, nous sommes en Gascogne occidentale, la présence anglaise y était légitime depuis le mariage d'Aliénor et les seigneurs généralement fidèles. Il n'y avait pas une armée d'occupation comme aiment le croire les érudits locaux, nuls contingents de féroces anglois retranchés derrière les murs de terre et de bois de Bezaudun, Lebret/Labrit ou autre. La présence anglaise était légère. Et les pauvres rescapés du massacre de Castillon en 1453 avaient d'autres soucis en tête que de traverser la Garonne pour arriver au Bassin et y enterrer une chèvre d'or qu'ils auraient eu le temps de couler entre temps!!!
Et apparemment, certains cherchent encore! Autant chercher le trésor d'un leprechaun en Irlande! Il y a autant de crédibilité à le faire!
Autre légende tenace, celle des souterrains. Encore une fois, combien de villages ont d'après les locaux, un souterrain qui part du château et va vers l'église? Ou qui part d'un château et va vers un autre, en passant sous les rivières tant qu'on y est? Étonnamment, l'archéologie préventive, urbaine ou rurale, n'est que très rarement tombée sur de réels souterrains-refuges et encore, il n'y a aucune certitude qu'ils aient été creusés dans ce but au départ. Si des cavités existent, sous les villes ou les vieilles bâtisses, cela s'explique et s'observe très bien : carrières souterraines pour extraire la pierre de construction, champignonnières, mines, silos, égouts etc. Bizarrement, dans la Grande Lande où le sol est de sable et la nappe phréatique particulièrement haute, des légendes de souterrains existent aussi : à Sabres ou Le Sen par exemple. Il y a toujours quelqu'un pour prétendre qu'il connait quelqu'un qui en a vu l'entrée, jamais de témoins directs... Seulement, dans la Grande Lande, il n'y a pas plus de souterrains que de dahus, car techniquement pour les temps anciens, il est impossible de creuser et maintenir une galerie dans un sol de sable gorgé d'eau plusieurs mois par an.
Et il en va de même pour le bassin d'Arcachon : il n'y a aucun souterrain à Comprian ou ailleurs.
Si d'un point de vue ethnographique, il est toujours intéressant de recenser les légendes locales, comme Arnaudin ou Bladé en leur temps, car elle font partie du patrimoine, il est bien d'expliquer aussi sur quoi elles reposent afin de les considérer pour ce qu'elles sont : une réappropriation rurale d'événements ou de lieux que l'on ne comprend pas, parce que tout témoin direct a depuis longtemps disparu. Le récit légendaire, déjà basé sur une incompréhension et sur une réinterprétation, est en plus transmis oralement et l'oralité ajoute, retranche, transforme, génération après génération. Malheureusement, l'article paru dans Sud-Ouest est écrit de telle manière que rien n'est contredit, que tout devient possible pour qui veut se donner la peine d'y croire.
Si l'on peut regarder avec amusement ou sympathie cette croyance naïve en l'existence d'une chèvre d'or, il en va autrement de la conséquence directe de cet article : il poussera nécessairement des individus crédules et avides à chercher à leur tour ce mirage. Et cela, en pillant au passage les lieux cités, qui renferment effectivement un authentique trésor : les traces de peuplement des populations anciennes, faites de tessons, de pierre, de silex, de boucles, de tuiles, le tout parfaitement préservé à des profondeurs différentes selon les époques, comme une frise chronologique verticale...et le tout sera irrémédiablement perturbé si un hurluberlu passe par là avec sa pioche pour chercher une chèvre en or qui n'a jamais existé. Et il faut préciser que des pillages ont déjà eu lieu il y a une semaine dans le coin, sur le chantier de fouille évoqué par ailleurs dans l'article : ce n'était donc pas la peine de remettre de l'huile sur le feu.
Hervé.
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je me lance pour mon premier message sur un sujet futile, la chèvre d'or et les souterrains. D'abord parce que dans mon enfance j'ai cherché la chèvre d'or à Comprian, au castera, dans les bois de Lamothe. ensuite parce que mes origines landaises me l'ont faite rencontrer aussi: mon grand père était persuadé que le docteur Lamothe cherchait la chèvre aux "tredze pouys " de Pouydesseaux. Séquence nostalgie terminée.
J'aimerai par ailleurs donner un avis. Les traditions orales sont certes pleines de souterrains ( de Roquefort à Sarbazan, de Carro à plusieurs endroits dans mon coin) mais il faut faire une distinction: quand les personnes parlent de souterrains l ne faut pas comprendre une cavité creusée par l'homme. Et c'est ainsi qu'un simple boyau devient alors un souterrain. en toute bonne foi!!! Tout le long de la Douze est alors rempli de souterrains...Certains même d'ailleurs ont des entrées creusées par l'homme, certains sont mêmes de véritables "cluzeaux" et peuvent donc être de vrais souterrains....
Dernière modification par Arnaud-Guilhem (2009-01-02 22:07:26)
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Que de souvenirs font surgir chez moi ces différents propos au sujet de " La chèvre d'or ". La mémoire des gens la fait apparaitre en divers lieux, la chose s'accompagnant souvent de l'inévitable souterrain, même en des lieux où le sol ne s'y prête guère ( faciès landais sableux et aqueux sur substrat d'alios ). Mais je puis témoigner, en tant qu'habitant de la région, que cette histoire de " Chèvre d'or " sévit avec une particulière intensité autour du Bassin d'Arcachon, vilaine dénomination venue remplacer la jolie désignation gasconne : " Petita mar de Buc ".
Les légendes sont ce qu'elles sont, et elles ne reposent la plupart du temps sur rien de fondé bien sûr. Mais que serait la vie sans elles et l'indispensable part de rêve qu'elles nous apportent, la vérité historique et la rigueur scientifique dussent-elles en pâtir ?
Mais, rassurez-vous, je ne suis pas parti à la recherche de ladite chèvre -et en un sens je le regrette - mais bien des vestiges d'ouvrages de défense qui, jadis, verrouillaient le cours de Leira ( La Leire et encore plus l'Eyre sont des cacographies francisées du nom de ce fleuve gascon ) et plus précisément de Leira du Teich, tandis que notre ami s'est plus spécialement attaché à Leira de Biganos qui, plus au nord, court elle aussi vers le bassin.
Pour y parvenir, j'ai du entreprendre, que ce soit rive droite et plus encore rive gauche, une invraisemblable aventure à la boussole, au travers de marécages spongieux et parfois mouvants, en trouant des massifs épais de roselières hautes de quelque trois mètres empêchant toute orientation à vue, ponctués d'esteys ( estèirs en gascon ) profonds et emplis d'eau à marée haute, le tout pour atteindre l'endroit voulu.
Ce lieu, désigné au nord par la carte comme " Le Pujau des Anglais " était, d'après maints témoignages locaux, pourtant réputé être l'épicentre du phénomène " Chèvre d'or ". " Pujau " ou " Pujòu " désigne bien entendu en gascon une hauteur.
Le site se présente comme une sorte de tumulus de quelques mètres d'élévation, couronné par un bouquet de chênes et où se remarquent au sommet les restes de soubassements maçonnés, site depuis lequel on domine l'immensité des paluds ( marais excusez-moi ) qui s'étendent vers l'ouest en direction du débouché de la lagune vers l'océan.
Quels efforts pour y parvenir, mais quelle satisfaction une fois le but atteint ! Et, de l'autre rive, se trouvent aussi deux petites élévations de terrain désignées " Les Pujaulets " et qui concouraient au contrôle de ce point de passage.
"Pujau des Anglais ", voici de quoi faire fantasmer les chercheurs de " Chèvre d'or " et pour cause. Mon sentiment est pourtant que ce lieu a peut-être été fréquenté par les sujets de la couronne anglaise, mais qu'il est peu probable qu'ils s'y soient attardés.
La suzeraineté des Anglais avait peu à se préoccuper d'y préserver son pouvoir, sûre qu'elle était de la chose par les oeuvres de ses alliés Gascons, au nombre desquels, en tout premier rang, figuraient les Captaux de Buch.
Et si vous voulez le fond de ma pensée, la Gascogne a connu son âge d'or du temps des Anglais, ses malheurs n'ayant commencé qu'à la suite de l'invasion faisant suite à la violation par le Roi de France du Traité de Brétigny.
Toujours est-il que j'ai voulu accomplir la traversée de ces marécages assez hostiles pour me rendre en un lieu de mémoire auquel ne donne accès le moindre petit sentier et j'en ai été empli de satisfaction.
Les ouvrages de défense dont il vient d'être question étaient en quelque sorte des postes avancés qui précédaient de peu, plus au sud-est et en amont du confluent des deux " Leiras " le très connu " Castera ", d'accès très facile, lui, sorte de motte féodale ayant donné son nom ( après cacographie française ) au bourg de " Lamothe ".
Mais, à vrai dire, ces installations défensives apparaissent avoir existé bien avant le rattachement de la Gascogne à la royauté anglaise ( Aliénor aidant fort ) et l'on peut sans doute faire remonter leur mise en place à des époques très antérieures, le besoin de sécurité ayant été malheureusement toujours d'actualité.
Je regrette de ne pas savoir le faire, mais je pourrais vous liver ci-joint des clichés de Pujau et des Pujaulets, car je n'ignorais pas dès le moment de mes escapades, l'âge devenant un handicap, que je n'aurais sans doute plus l'occasion de tenter à nouveau une si hasardeuse expédition, et j'ai voulu en garder la trace photographique.
En tout cas, voici comment il m'est advenu de côtoyer d'un peu plus près la légende de " La Chèvre d'or ".
Si je vous livre les détails topographiques ci-dessus, c'est parce que nous sommes entre nous. Mais je partage entièrement les craintes de ceux qui dénoncent des informations livrées au public sans précaution par la grande presse, sachant quels désastres archéologiques cela est susceptible d'entraîner. Amitiés. Yves Robert
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Merci Yves pour cette intervention empreinte de nostalgie à plus d'un titre.
J'avoue avoir souri quand vous écrivez "invasion" en parlant de la fin de la suzeraineté anglaise en Gascogne : en effet, lorsque j'étais guide touristique et que des visiteurs me parlaient d'occupation anglaise au Moyen Age ou d'ennemi anglais pendant la guerre de Cent ans, je ne pouvais m'empêcher de rétorquer en parlant de conquête française après la bataille de Castillon ou de préciser qu'il n'y avait aucune raison pour nous ici de considérer Jeanne d'Arc et ses compagnons comme étant nos héros... L'histoire de "France" est en grande partie une construction identitaire.
Concernant le delta de la Leyre, cette zone est effectivement intéressante pour ses ouvrages de terre médiévaux, destinés tout autant à contrôler le territoire qu'à signifier symboliquement la présence du pouvoir seigneurial. Chronologiquement, on peut les faire remonter au XII-XIIIe siècle. Si la fortification de terre est souvent l'expression d'un pouvoir local, il n'empêche que le Roi-duc anglais a pu contribuer ou inspirer la mise en place de certains chateaux de terre : c'est le cas dans la région de Labouheyre ou du Brassenx, ou même de Labrit. Dans ce dernier cas, les recherches archéologiques menées, bien loin de retrouver des traces des vikings dans l'érection de ce castrum (certains comprendront l'allusion...), permettent de situer la mise en place de cette large forteresse au début XIIIe siècle, dans un contexte de réorganisation stratégique des possessions anglaises après la perte du Poitou et de la Saintonge.
Sur ce, je dois reprendre le travail. C'est tout pour cette fois!
amicalement,
Hervé.
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