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#1 2010-08-22 11:45:11

archeolandes
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Découvrir l'Histoire des Landes

Les lecteurs de Sud-Ouest ont pu cet été s'initier à l'Histoire landaise, à la toponymie gasconne et à l'archéologie, à travers les chroniques documentées de Jean-Jacques Fénié, qui vient par ailleurs de signer un ouvrage intitulé "Les Landes", aux éditions Sud-Ouest.

L'œil expert d'un Landais
Par Philippe Guillaumie

L'auteur Jean-Jacques Fénié publie « Les Landes », un guide touristique précieux pour découvrir le département.

«Si au cours de leur existence dépassant les deux cent vingt ans (le département a été créé en 1790), les Landes ont petit à petit forgé leur personnalité, elles sont bel et bien constituées de pays plus ou moins étendus, héritiers des divisions de l'Ancien Régime, définis par leur caractère géographique et toujours marqués par leurs traditions. Connaître les Landes, c'est donc parcourir des contrées différentes. »

Cette diversité qu'il souligne, Jean-Jacques Fénié, chantre infatigable de notre département et du parler gascon, nous propose de la découvrir dans le « guide touristique » sur « Les Landes » qui vient de paraître.
« En parcourant le passé »

Après une brève évocation d'un passé très lointain - des témoignages sur l'industrie acheuléenne (- 200 000) découverts en Chalosse et en Pays d'Orthe, la Dame de Brassempouy (entre - 29 000 et - 22 000), la cité sublacustre de Sanguinet (de - 1 700 à - 200 ) - , l'auteur nous invite à « parcourir le passé » à travers la romanisation, le long Moyen Âge, (édification d' églises, bastides et castelnaus, « voies sacrées » vers Compostelle, suzeraineté anglaise, guerres de religion...), la Révolution, le XIXe siècle et la mise en valeur du département, la situation actuelle...

Des événements importants sont rappelés, des Landais célèbres évoqués (Diane d'Audoins, « la belle Corisande », d'Hagetmau, d'Audijos de Coudures, le général Lamarque de Saint-Sever, Roger Ducos de Dax, Félix Arnaudin de Labouheyre, Bernard Manciet de Sabres, etc).
Légendes et traditions

Suit, de la Grande Lande à la Chalosse et au Bas-Adour, du Pays de Born à l'Armagnac et au Tursan, des Petites Landes au Marsan et à la Maremne, une longue promenade au cours de laquelle l'auteur rapporte les faits majeurs qui s'y sont déroulés, les légendes qui y sont attachées, les traditions qui y perdurent, et bien sûr tout ce qu'il faut y voir.

Et, en prime, comme ce n'est pas Jean-Jacques Fénié qui allait oublier que les Landes sont une région de langue d'oc, tout est enrichi de nombreuses références, notamment toponymiques, à la langue gasconne.

Magnifiquement illustré d'environ 150 photos, conclu par un utile « petit glossaire landais » et un index très complet, cet ouvrage court (80 pages) mais à la fois dense et concis, est un vrai trésor, indispensable tant pour le Landais voulant mieux connaître son pays que pour le touriste qui souhaite le découvrir.

(1) « Les Landes », guide touristique, rédigé par Jean-Jacques Fénié, collection « Connaître » aux Éditions Sud-Ouest (7,50 €).

source : http://www.sudouest.fr/2010/07/06/l-oei … 8-4624.php

"Un nom, une ville. Pourquoi cette ville landaise porte-t-elle ce nom-là ? Et depuis quand ? Une série estivale qui vous instruit et vous en dit plus sur la toponymie du département."


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#2 2010-08-22 11:55:27

archeolandes
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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/07/19/aux-o … 2-3307.php
19 juillet 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Aux origines de Biscarrosse

Al'entrée de cet ancien village du Pays de Born devenu une ville importante à l'échelle des Landes, on découvre les panneaux « Biscarròssa, comuna de Gasconha » aux entrées de l'agglomération. Le toponyme a dû désigner initialement le cordon dunaire - la « Montanha » qui atteint pratiquement les 80 mètres d'altitude - au pied duquel s'est installée la première communauté.

Le nom vient probablement d'une racine « aquitanique ». C'est-à-dire de la langue primitive existant avant la lente romanisation de cette Aquitaine littorale. La toponymie étant souvent très pragmatique, très liée au terrain et au paysage en général, il faut songer que dans le nom de cette vaste commune, il y a l'équivalent du basque « bizkar » (dos, crête allongée, rappelant vaguement un moutonnement, dune…). N'existe-t-il pas en gascon le verbe « biscarrar », tondre les brebis ? Et ne trouve-t-on pas un « pueblo » nommé Biscarrués dans la province aragonaise de Huesca ?

Contrairement aux suffixes gallo-roman -acum et latin -anum qui reposent généralement sur des noms d'hommes, le suffixe -otze qui évolue en -òs ou -òssa, est typiquement aquitanique. Il prend un sens simplement locatif : « endroit où il y a ». Il a été utilisé bien longtemps après la conquête romaine et peut donc se retrouver accolé à des anthroponymes latins (Andernos, Bernos, Biganos, Pissos…).
Dès la Haute-Antiquité

Les importants vestiges archéologiques de l'âge du Fer trouvés immergés dans le lac de Biscarrosse non loin de l'axe d'un grand itinéraire antique reliant Dax à Bordeaux, ainsi que le vocable de la paroisse, sont des éléments qui plaident tous en faveur d'un établissement très ancien.

Sur la commune de Biscarrosse, le lieu-dit Navarrosse, sur la rive sud du lac, est probablement aussi ancien que le nom de la paroisse à laquelle il se rattache. Dans cette zone côtière peuplée dès la Haute Antiquité, on peut proposer pour ce toponyme une base « nava » (vallée, combe), à laquelle sont associés les suffixes indigènes -are et -otze. La traduction en est « lieu vallonné ». Le panorama, face au vaste plan d'eau du lac, y est magnifique, mais, juste derrière, le relief dunaire, sous la couverture de la forêt, est bien constitué de creux et de croupes bosselées.


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#3 2010-08-22 11:56:32

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/07/24/aux-o … 4-3167.php
24 juillet 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Aux origines du Cap de Gascogne

Des saints à profusion, le premier millénaire de l'ère chrétienne n'en est pas avare. La légende est souvent plus riche que la chronique minutieuse des faits et des gestes, et la procédure canonique et rigoureuse de la béatification n'apparaît que plus tard. Rien d'étonnant donc à ce qu'un ancien légionnaire de l'Empire romain finissant, nommé Severus, au début du Ve siècle, ait évangélisé la contrée vasconne et y ait péri sans abjurer sa foi. Un brave martyr donc, si l'on ose dire, comme on en faisait à l'époque ! Son nom est à l'origine du premier bourg (VIIe siècle probablement) formé autour d'une abbaye bénédictine détruite en 812, dont on ne sait pas grand-chose.

On observera qu'à côté de notre « Sent Sever » landais, existent aussi en domaine gascon un Saint-Sever-de-Rustan bigourdan (Hautes-Pyrénées) et un Saint-Sève en Gironde, non loin d'ailleurs de ce qui fut la grande abbaye de « La Rèula » (du latin « regula » au sens de règle monastique), c'est-à-dire La Réole.

La cité renaît à la fin du Xe siècle, quand le duc Guilhèm Sanç (Guillaume Sanche) fonde un monastère qui adopte la règle de Cluny. La puissance de la nouvelle abbaye s'accroît rapidement car elle tire des revenus substantiels de vastes domaines répartis en Chalosse et Marsan. Centre spirituel et intellectuel majeur, elle abrite clercs et copistes de grande valeur comme celui qui a réalisé le fameux « Beatus ». C'est une œuvre réalisée au temps du père abbé Grégoire de Montaner (1028-1072), dans le scriptorium (la salle des copistes, la seule chauffée probablement…) par un moine appliqué et artiste nommé Stephanus Garsia. Ses enluminures représentent notamment l'Apocalypse de saint Jean.
Dominant l'Adour

Ce vaillant intellectuel levait-il de temps à autre les yeux de son parchemin pour regarder l'horizon s'offrant au « Cap de Gasconha » ? La cité est en effet fondée sur un promontoire appelé Tuc de Morlane. Dominant l'Adour, ce site défensif est éminemment stratégique. Il a été occupé certainement bien avant que les Romains n'y établissent un poste militaire et qu'un petit gouverneur y construise une demeure cossue ayant fourni du mobilier archéologique de qualité (céramique sigillée, bijoux, monnaies, fragments de colonnes et chapiteaux…).

Non loin, en contrebas vers l'ouest, le hameau d'Augreilh a révélé pour sa part, au lieu-dit Gleyzia (gascon « gleisiar », « domaine où s'étend l'église »), sur la dernière terrasse alluviale de l'Adour, une vaste villa antique fouillée par le docteur Paul Dubedat. Non seulement de remarquables mosaïques polychromes s'y sont révélées, mais on y a mis au jour d'intéressants chapiteaux paléochrétiens, d'autant que le site servit de nécropole jusqu'à l'époque médiévale.


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#4 2010-08-22 11:57:59

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/07/31/aux-o … 75-726.php
31 juillet 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Aux origines gasconnes de la cité aturine   

Un nom, une ville. Pourquoi cette ville landaise porte-t-elle ce nom-là ? Et depuis quand ? Une série estivale qui vous instruit et vous en dit plus sur la toponymie du département. Aujourd'hui, partons à la découverte d'Aire-sur-l'Adour.

On observera d'abord qu'en gascon et dans la langue occitane en général, on se passe d'article pour désigner fleuves et rivières. On aurait donc bien raison de parler d'Aire-sur-Adour et non sur « l'» Adour, alors que, là-haut, aux confins du Nord et du Pas-de-Calais, on rencontre précisément Aire-sur-la-Lys. N'a-t-on d'ailleurs pas, aux marges de la Gascogne, Gironde-sur-Dropt, Villeneuve-sur-Lot ou Portet-sur-Garonne ?

En fait le nom administratif officiel de la cité des Aturins est presque une redondance. « Aira », dans sa forme gasconne, ou Aire en graphie administrative, est le continuateur de la forme Atur + a du féminin. Entendez quelque chose comme « Atura villa », domaine de l'Adour. Or, il ne faut jamais oublier que dans la plupart des langues, on accentue telle ou telle lettre, ou bien on a tendance à faire disparaître telle autre. Ainsi, en appuyant sur la première syllabe, est-on passé de « Atura » à « Atra », puis « Aira », francisé en Aire.

Parmi les mentions anciennes - si importantes pour la compréhension de la plupart de nos toponymes -, on trouve « Ripas Aturi » au Ier siècle après J.-C. Et il est aussi question de la « civitas Aturensium », autrement dit la « cité des gens d'Aire ». La tradition y place la capitale des Tarusates, même si, concédons-le, lesdits Tarusates d'aujourd'hui sont les habitants de Tartas…

Pour autant, l'abondance des vestiges dits « protohistoriques » (entre préhistoire et histoire), notamment des tumulus, et le toponyme proprement dit, attestent de l'origine fort ancienne de cette ville au bord de l'Adour, aujourd'hui capitale du Tursan.
Martyre céphalophore

La cité des Tarusates ou des Aturenses (citoyens d'Atura) fut une circonscription administrative importante dans les derniers temps de l'Empire romain. Se rappelle-t-on que ce fut probablement un lieu d'implantation assez précoce du christianisme ? En témoignent le beau sarcophage de l'église du Mas et la légende de sainte Quitterie (senta Quitèira en gascon), jeune princesse et martyre céphalophore (décapitée, elle fit un bout de chemin en portant tranquillement son chef…).

Les Wisigoths y furent établis vers les Ve et VIe siècles sans laisser de trop mauvais souvenirs. De ce passé assez prestigieux, la ville conserve toujours une cathédrale, et le diocèse des Landes est toujours officiellement celui d'Aire et Dax. Une double titulature qui n'est pas si courante.


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#5 2010-08-22 11:59:42

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/02/les-e … 8-2481.php
2 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié

Les eaux mêlées du Moun

Le chef-lieu est souvent appelé « Lo Mont ». Aux pages locales de notre journal, on évoque certes souvent « Lou Moun ». Mais on devrait bel et bien écrire « Lo Mont » en graphie classique normale du gascon puisque le « o » sans accent grave se prononce toujours « ou » en langue d'òc. Cependant, force de l'habitude et information sans doute insuffisante font que demeure le « noyau dur »…

Quoi qu'il en soit, la cité aux trois rivières est un magnifique site de confluence. Le Midou (Midor en gascon) et la Douze, nés pas très loin de Marciac, jouent d'abord en solo à travers les croupes de l'Armagnac gersois. La demoiselle - si les rivières ont un genre - monte d'abord vers la Lande où, à Roquefort, elle s'abreuve des eaux modestes de l'Estampon puis de la Gouaneyre, née dans les marais de la Haute-Lande au sens primitif topographique. Naguère, jusqu'à Tartas et Audon, on parlait encore de la Douze mais sur les cartes, chante en fait un joli mot-valise, la Midouze. Les chargements de grains, de bois et de futailles d'« aigardent » (eau-de-vie) ont longtemps descendu la rivière, puis l'Adour, sur de solides « galupas », en particulier les « shalibardons » à l'étrave et à la poupe pointues.

Chef-lieu par hasard

Le site primitif de la ville, devenue un peu par hasard chef-lieu départemental, est en fait Saint-Pierre-du-Mont. Au sud-ouest de l'agglomération, c'est bel et bien une hauteur, alors que Mont-de-Marsan s'étale au bord de l'eau. Une église romane sous la protection de saint Pierre est assurément une preuve de l'ancienneté de la fondation, d'autant qu'on y a exhumé des vestiges du IIIe et IVe siècles. Même si les richesses archéologiques de Mont-de-Marsan intra muros sont importantes, c'est certainement Saint-Pierre-du-Mont qui constitue la première paroisse. « Lo Mont » est une bastide, une ville « neuve » fondée en 1133 par Pierre, fils de Lop Aner de Marsan. Le nom de la famille éponyme vient de la paroisse de Marsan (Gers) ; issu du latin Martianus, il évoque également une fondation antique.

Le site même « deu Mont » est en fait occupé depuis très longtemps. Face à Saint-Pierre, sur les hauteurs, vivait dans la ville basse une population de bateliers autour du prieuré de Saint-Genès-des-Vallées. Après la fondation du bourg par le vicomte de Marsan, des « poblants » (colons) s'installent dans la ville neuve exempte de taxes, un « barri » fortifié (« éperon barré » pour les spécialistes) entre la confluence et un fossé oriental reliant Midou et Douze.


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#6 2010-08-22 12:00:29

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/03/que-d … 3-3390.php
3 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Que d'eau à Soorts-Hossegor

Le nom de l'écart ou quartier d'Hossegor n'est accolé à Soorts qu'en 1912. La notoriété de ce site touristique ne commence en effet qu'à la Belle Époque. L'un des premiers membres de l'Académie Goncourt, Rosny Jeune, s'installe discrètement dès 1903 dans la solitude des rives arborées du « lac marin ». On l'appelle ainsi depuis son aménagement dans les années 1870 : la lagune est remplie et vidée quotidiennement par la marée. Puis ce lieu de « privilégiature » élégante acquiert véritablement sa célébrité avec les personnalités qui y viennent et les opérations immobilières qui s'y greffent, à partir des années 1920. Le style architectural, qui s'y affirme, est appelé curieusement « basco- landais ». Les motivations des promoteurs et architectes ayant fait Hossegor n'étaient certes pas linguistiques, mais ils étaient dans la tendance générale du style dit « néo-vernaculaire », lié à un certain régionalisme.
Deux mots associés

Or, le microtoponyme Hossegor (mentionné sur les cartes anciennes Ossegor ou Haussegor au XVIe siècle, lac d'Ossegore sur la carte de Cassini au XVIIIe siècle) semble associer deux mots du lexique gascon ancien : l'hydronyme « ossa » ou « òssa », associé à un adjectif. Ne trouve-t-on pas dans les Landes, en Béarn et bien sûr en Euskadi de nombreux ruisseaux ou rivières appelés Ousse ou Osse ?

Pour le qualificatif, on peut hésiter. En effet, d'une part, « agòr », qui peut signifier l'automne en gascon, a également un sens ancien de « sec, tari ». D'autre part, « gòr » désigner la couleur rouge (« gorri » en basque).

Le nom signifierait dès lors « eau rouge », c'est-à-dire « ferrugineuse ». Dans le même esprit, un lieu-dit Bas rouge ne se repère-t-il pas par exemple au nord, à Léon ? Quant au sens d'« eau sèche » ou « tarie » - étonnant à première vue, encore qu'on trouve, y compris dans la Grande Lande, des lieux-dits du type « l'aiga sèca » - il faut le comprendre comme « bras de cours d'eau asséché ». N'est-on pas dans la zone de divagation du lit ancien de l'Adour qui se jeta plus au nord, vers Vieux- Boucau ? « Òssagòra » est donc la graphie normale gasconne respectueuse de l'étymologie.

Faudrait-il pour autant oublier la « commune-mère », Soorts, plus ou moins évincée par la station, sa fille, un tantinet « people » ? La paroisse de Soorts est mentionnée « Sanctus Stephanus de Souz » dans le cartulaire de Dax, puis « Sorts » au XVIIe siècle ou « Sortz en Marene » au XVIIIe. Ce nom de lieu paraît bien venir du verbe occitan « sórder » (sourdre, jaillir) qui a fourni le lieu-dit « sordar » (source, fontaine). Est-ce étonnant dans des zones humides proches de l'ancien cours de l'Adour ?


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#7 2010-08-22 12:01:28

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/04/mimiz … 9-3350.php
4 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Mimizan la romaine

Les gens du Pays de Born, au sein duquel est bien ancrée cette commune littorale, prononcent « Mamisan », à la gasconne. Étrange évolution phonétique parfois des noms de lieux !

D'une première mention « ecclesia Sanctae Mariae de Mimisan » dans une charte de 1009 à des formes telles que Mimisano ou Mimisani au gré des déclinaisons latines transcrites par les copistes médiévaux, on observe pourtant une certaine constante. Elle laisse entendre que l'appellation de la paroisse vient d'un nom antique, Mimisius. Assez rare dans la recension des noms latins, il est cependant attesté ; c'est-à-dire dûment repéré dans une inscription lati- ne.

Et le chercheur en toponymie, attentif à des évolutions comparables en domaine gascon et occitan en général, de reconstruire le cheminement de la prononciation du nom à travers les siècles : Mimisianu(m) ou Mimisiano, puis Mimisian et Mimeisan se réduisant ensuite à Mimesan qui se modifie en Memisan et enfin Mamisan.

Où se situait la propriété dudit Mimisius ? Mystère. Mais l'on sait qu'elle était probablement installée à quelques lieues de l'antique voie littorale menant à Dax et de la station de Segosa, mentionnée par l'Itinéraire d'Antonin. Laquelle est aujourd'hui identifiée au nord-ouest de la commune voisine de Saint-Paul-en-Born.

En effet, des fouilles archéologiques réalisées entre 1977 et 1994 y ont révélé, précisément aux lieux-dits Loubeyres et Tuc de l'Église, un cimetière à incinération du premier âge de fer et des vestiges d'époque romaine (fondations, céramique) et du Moyen Âge (petit mobilier métallique).
Sur son petit fleuve côtier

Mimizan a toujours eu quelque importance en bordure de son petit estuaire dont le parcours a évolué au gré des siècles et des modifications côtières (la dernière, vers 1828, déplace le « courant » vers le nord, laissant pour témoignage de l'ancien exutoire les deux petits étangs des Mailloueyres). Ainsi, en 982, le duc Guillaume Sanche (Guilhèm Sanç) donne à l'abbaye de Saint-Sever l'ancien territoire du prieuré de Notre-Dame, avec privilèges de franchise. Cela fait de Mimizan une « sauvetat » dont on repère les limites grâce aux « pyramides de sauveté », en fait des bornes en « pèira nhòga » ou « garluche », hautes de 4 mètres et surmontées d'une croix.

Bien avant le tourisme et l'activité papetière, la paroisse de Mimizan recevait, par une autorisation de Guillaume, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine, des dîmes sur les pêcheries établies sur le petit fleuve côtier. Depuis, évidemment, beaucoup d'eau a coulé sous la passerelle de Gombaut et sous le pont Rouge…


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#8 2010-08-22 12:02:09

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

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5 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Dax la bouillonnante

Sous-préfecture, siège de l'évêché, tribunal, gare ferroviaire d'importance : Dax, dans un petit Larousse de l'Entre-deux-Guerres ou dans une géographie de l'enseignement primaire supérieur de jadis, avait sa petite place. Ajoutez-y une description pittoresque du marché au gras par quelque Curnonsky dans un guide touristique et gourmand des débuts de l'automobile et vous avez le très provincial portrait de la cité des « eaux des Tarbelles ». Car c'est bien ainsi (« Aquae Tarbellicae » au IVe siècle) qu'est mentionnée pour la première fois la ville édifiée au contact des « bartas » humides de l'Adour.
Les eaux d'Auguste

Au IIe siècle, alors que la ville est devenue depuis une réforme administrative du début de l'Empire romain la capitale d'une des 21 cités d'Aquitaine, il est fait mention des « eaux d'Auguste » (Aquae Augustae), autre manière d'évoquer les vertus de la « Fontaine chaude ». Laquelle, encore de nos jours, est dite la Nèhe, du nom d'une divinité bienfaisante ou déesse mère attestée en particulier dans toute la Rhénanie. On était sans doute loin des 50 000 curistes venant chercher les bienfaits de l'eau et des péloïdes, ces boues qui, en particulier, soulagent les rhumatisants. Mais, on l'a compris, avec Dax, il est question « d'eaux ». Les mentions anciennes, précieuses auxiliaires du toponymiste, sont presque légions pour l'attester : « civitas Aquensium » vers l'an 400, « episcopus Aquensis », « Aquis ». Et dans le riche Cartulaire de Dax du XIe-XIIe siècles, les paroisses dégoulinent, si l'on ose dire, sous l'eau bénite et bénie probablement par les aubergistes et propriétaires de « tabernae » de l'époque : Sancta Maria de Ax, Sanctus Vincentius de Ax…
À la postérité

Le nom de la cité aurait pu passer à la postérité sous la forme Ax ou Aix ou « Las Aigas » (souvenons-nous qu'Eugénie-les-Bains est ainsi désignée en gascon). Mais non ! À partir du XVIIe siècle, notamment sur les belles cartes qui commencent à sortir des cabinets des géographes, on voit apparaître Acqs puis d'Acqs et Dax. D'où l'habitude d'écrire « Dacs » ou, mieux, « D'Acs » dans la forme graphique gasconne.

On fera observer qu'à la fin du XIXe siècle, alors qu'érudits locaux fort cultivés et historiens commençaient à se passionner pour ce riche et lointain passé, les édiles dacquois firent abattre une bonne partie des remparts antiques datant du Haut Empire. Seul demeure à peu près intact le plan classique du « castrum » originel.


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#9 2010-08-22 12:02:57

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

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7 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Les noms multiples de Tyrosse

Certes, à l'entrée de la commune où longtemps processionnèrent voitures et camions sur le chemin de Bayonne, on peut lire « Semisens ». Pleine de bonne volonté, cette transcription uniquement phonétique de la prononciation gasconne, correspond en fait - partiellement - à la graphie logique de ce nom de lieu dans la langue d'oc, « Sent Vincenç de Tiròssa ». Dès le XIe ou XIIe siècle, dans le fort précieux cartulaire de Dax, il y a simplement la mention « Tirossa », mais apparaît aussi la paroisse « Sanctus Vincentius de Maredme ». Par la suite, avec une régularité absolue au cours des siècles de l'époque moderne, se repèrent les formes « St Vincent » ou « St Vincens ».

D'emblée, si besoin était, une évidence : l'hagionyme (nom de saint) n'a rien à voir avec le fameux Vincent de Paul, le « Monsieur Charité » du temps de Louis XIII et de Mazarin. Mais, puisqu'on est tout de même proche de Dax, il s'agit du premier évêque légendaire de la cité thermale, saint Vincent de Xaintes, dont le culte gagna bien évidemment les contrées proches. Le latin « Vincentius » donne très logiquement « Vincenç » selon les critères de la phonétique gasconne.

Ensuite, le déterminant « Maremne », un temps utilisé, rappela que la paroisse appartient au « pays » ou ancienne vicomté de Maremne. Une mention, évidemment rédigée dans le latin des scribes, évoque l'« archipresbyteratus Maritime » en 1527. Située entre l'Adour et l'océan, cette petite contrée si proche de la « Mar Grana » - l'Atlantique pour les Gascons - tire précisément son nom de l'adjectif latin « maritimus » qui évolue en « marít (i) mus » puis « marétme » et enfin « Maremne ».
Le saint étêté

Mais « quid » enfin de Tyrosse ? Observons au passage qu'il tend depuis déjà plusieurs décennies à évincer le nom complet de la commune. Ne parle-t-on pas de l'« US Tyrosse » ou de la temporada de Tyrosse dans les pages locales et sportives de notre quotidien régional ? Le linguiste allemand Gerhard Rohlfs, qui fut un spécialiste reconnu du gascon, proposa pour origine un nom d'homme latin, Tiro (non attesté, hélas…), suivi du classique suffixe aquitanique « - otze » (lieu, domaine) très présent dans le domaine gascon sous la forme « - òssa ». Dans son « Dictionnaire toponymique des Landes et du Bas-Adour » (coédition Cairn - Institut occitan, 2005), Bénédicte Boyrie-Fénié propose un dérivé de « tira » (chemin, sentier servant au transport des troncs d'arbres), issu du verbe « tirar » (tirer). Pourquoi pas ? Après tout, la commune a prospéré, au XXe siècle il est vrai, avec la voie ferrée et la route.

Ah ! J'allais oublier… Au temps de la frénésie révolutionnaire et surtout sans-culotte et anticléricale, on étêta le toponyme, en « Vincent-de-Tyrosse ». Ce fut bref mais, décidément, on a toujours voulu faire court dans le pays.


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#10 2010-08-22 12:03:44

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/09/histo … 5-3566.php
9 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Histoires d'eaux à Tarnos

Le découpage départemental a légèrement écorné le Seignanx (lo Senhans), ce « pays » dans lequel se situe Tarnos, aux confins des Landes et des Pyrénées-Atlantiques. Ainsi Le Boucau (« lo Bocau nau » en gascon), qui fut un quartier de Tarnos jusqu'en 1857, se retrouva dans les ci-devant Basses-Pyrénées. De même, Saint-Étienne-d'Arribe-Labourd, autre commune primitivement landaise - en 1790, s'entend, quand on départit la trame administrative complexe de l'Ancien Régime - se vit, elle, rattachée à Bayonne : c'est le quartier Saint-Esprit. Tout cela, au fond, est un peu une histoire d'eau.

Tarnos, toujours mentionné ainsi dès le Cartulaire de Dax (XIe-XIIe siècles), pourrait bien en effet être l'élargissement d'une base hydronymique « tar », fort ancienne puisque « pré-indo-européenne », disent les spécialistes. On la retrouve dans les noms de ces rivières qui ont une plus ou moins grande notoriété : le Tarn, qui peut s'en rengorger à juste raison, son petit affluent le Tarnon descendu du massif de l'Aigoual ou le Ternain morvandiau… On a également avancé un nom celtique, Tarinus, celui d'un homme ou d'une divinité, étrangement arrivé dans ces lieux à la topographie un peu plus complexe qu'il n'y paraît.
Dunes mouvantes et lagunes

Certes, Tarnos, qui a eu un peu un destin de ville champignon grâce à l'industrie et à la zone portuaire de Bayonne, a son noyau primitif villageois sur les hauteurs. Or, sous la poussée urbaine récente, faite de lotissements et de zones commerciales, on perd largement aujourd'hui le sens de la topographie. D'autant que la voix artificielle du GPS s'en mêle de plus en plus… Cependant, dans la partie basse du territoire communal, on sait combien les histoires d'eau furent importantes. L'Adour y passait, infléchissant nettement sa direction, vers le nord. Jusqu'en 1578 le fleuve gascon traversait certes Bayonne, mais au coude des marais du Trossoat il formait un « angle » le faisait remonter droit vers « lo Bocau Vielh » (Vieux-Boucau). D'où Anglet, (Angles en 1188). Il longeait alors la côte, faite de dunes mouvantes et de lagunes, pour atteindre la zone naturelle de subsidence s'ouvrant sur le fameux Gouf de Capbreton. Du XVIIe au XIXe siècle, progressivement, le vieil estuaire s'estompa dans les sables, les bras morts, les dunes et les « pinhadars » qui prirent de l'ampleur.

Le destin industriel et ouvrier de Tarnos et du Boucau démarra véritablement dans les années 1880. La desserte ferroviaire et la proximité de l'Espagne riche du minerai de fer de Biscaye, conduisirent pour plus de 80 ans à l'implantation de l'usine des Forges de l'Adour. Le charbon alimentant les hauts-fourneaux venait d'Angleterre ou du Pays de Galles, cependant que les cargos exportaient les poteaux de mine de la forêt landaise. Aujourd'hui, la zone industrialo-portuaire de Bayonne-Boucau-Tarnos confirme toujours un peu cette histoire d'eaux.


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#11 2010-08-22 12:04:31

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/14/luxey … 4-4715.php
14 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fenié
Luxey cultive ses racines

Vingt ans déjà, et un peu plus ! Suite, en particulier, au « Palombopéra » de Bernard Lubat, Luxey a pris son envol. Mais, « hilh de cloca ! », les 20, 25 000 ou 30 000 visiteurs qui vont « trepejar, pèbàter, pèhorar » (tout cela veut dire piétiner, fouler au pied en gascon) la place du village ou l'enclos des Sarmouneys (« sarmonèir », celui qui est un peu long dans ses sermons, ennuyeux) vont-ils, comme il convient, prononcer la diphtongue ? C'est le même son, la même articulation que dans soleil, sommeil ou vermeil. Mais on comprend cependant que ces noms à prononcer parfois sont difficiles… Surtout pour ces « estrangèirs » venus des territoires d'Outre-Leyre ou plutôt d'Outre-Garonne. En effet, ce suffixe -ey (-èir en graphie normale occitane du gascon) se retrouve à foison dans le nord des Landes ou en Gironde, Bazadais compris.

Dans les « Reconnaissances de fiefs » et autres « Rôles gascons » - parchemins fort utiles pour l'histoire de la Gascogne médiévale au temps de notre soutien le roi d'Angleterre en même temps duc d'Aquitaine -, il est question de la « parrochia de Lucser » en 1274 et de « Luxeir, diocesus Vasatensis » (1289), autre dit dans la dépendance de l'évêque de Bazas qui mordait un peu jusque dans l'actuel canton de Pissos.
« Bois promis à coupe rase »

Cette terminaison administrative « ey » est bien la transcription à la française de « Lucser » ou, mieux, « Lucsèir », selon la susdite prononciation gasconne.

Il s'agit donc d'un « bois » (gascon « luc »). On retrouve ce nom dans bien d'autres noms ou toponymes : Duluc, Lubbon (Luc bon), Lucbardez (Le bois fangeux), Lucmau en Gironde, Luglon (Luc long) ou les Lugues, cette zone forestière depuis longtemps attestée sur les rives du Ciron, cette rivière née aussi dans la Haute-Lande topographique des confins départementaux.

La comparaison avec des lieux dits Luxiguey (commune lot-et-garonnaise d'Allons) et Lixer (commune de Maylis dans les Landes) fait pencher pour une forme contractée de « luc seguèir » (bois envahi par les ronces) selon Bénédicte Boyrie-Fénié (« Dictionnaire toponymique des Landes et du Bas-Adour », Cairn/Institut occitan, 2005). Alors, d'où vient « seguèir » ? En gascon, « sèga » a trois sens : a) la ronce, mais on emploie plutôt le mot au pluriel (« las sègas » synonyme d'« arromèc ») ; b) la signification pan-occitane servant à désigner la scie (radical latin « secare », couper ») ; c) par extension, on passe à un troisième sens, celui de « bois de pins », de « coupe », c'est-à-dire de « parcelle promise à une coupe rase ».

Malgré les ravages de la tempête Klaus et cette bénéfique ouverture à la diversité des cultures et expressions grâce au festival Musicalarue, Luxey/Lucsèir ne peut couper avec ses racines et faire de son passé table rase.


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#12 2010-08-22 12:05:19

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/18/pierr … 6-3381.php
18 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Pierres antiques du Pays d'Orthe

Avec son château d'Aspremont, ses auberges où les jours de marché, on donne de solides coups de fourchette ; ses belles allées ombragées, les eaux assagies des Gaves réunis, et, à peine en aval, la masse tranquille de la bastide d'Hastingues - l'un des rarissimes noms anglais légués par le défunt duché d'Aquitaine - Peyrehorade est sympathique.

Que révèlent les mentions anciennes ? On trouve la forme latine « petras cavas » (littéralement les « pierres creuses ») vers 1105 dans le Cartulaire de l'abbaye voisine de Sorde. Puis la régularité s'installe à peu près dès le temps de la Gascogne médiévale : Pereforade en 1305, Pierrehourade et Peyrehourade sur des cartes du XVIIe siècle dont celle dite de Gudocus en 1630, puis Peirehourade en 1714 (carte dite d'Amsterdam).

La forme gasconne « horada » est celle du participe passé féminin du verbe « horar » directement arrivé du latin « forare » (percer, forer). S'agissant donc d'une « pèira horada », le toponyme a très pro- bablement un lien avec d'ancien- nes carrières ou les vestiges d'antiques constructions dont les murs avaient été épierrés, « troués ». N'a-t-on pas, tout à côté, près de la bretelle autoroutière d'Orthevielle, un édifice préroman en ruines du lieu-dit Pardies qui signifie « murailles » ou plutôt « murettes » ? Le terme vient comme Pardies-en-Béarn (canton de Monein) du latin « parietinas » qui donne « pardinas » et « pardias » en gascon, au sens de « pâturage clos ».
Zone métisse

Certes, on trouve quelques belles bêtes à cornes et quelques volailles grasses à souhait au marché du chef-lieu de canton, comme dans certaines nouvelles de Jean Rameau qui avait élu domicile sur le coteau voisin de Cauneille, face au magnifique panorama des Pyrénées. Mais ce n'est sans doute plus ce que ce fut, même si la production fruitière de maïs, de kiwis - ce fruit chinois d'origine pourtant arrivé des antipodes - et l'élevage donnent toujours aux barthes (« bartas » en gascon, ensemble de prairies humides et de bois protégés par des digues) un air d'opulence au petit Pays d'Orthe.

Et là, il est encore question de pierres, celles d'un petit domaine foncier. Le Cartulaire de Dax confirme en effet l'identification d'une « villa de Bort » située à… Orthevielle. Or, le latin « villa » donne « vièla » (domaine, localité, bourg), comme dans Vielle-Tursan ou Vielle-Soubiran. Il y a eu assurément une évolution de « Borta villa » en « òrta vièla » par dissimilation (séparation puis abandon du B initial) sous l'influence de la phonétique basque. N'est-on pas aux franges de la zone « charnega » (métisse) où l'euskara, dès qu'on aborde la Bidouze toute proche, apparaît, au moins dans la microtoponymie (parcelles, lieux-dits).


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#13 2010-08-22 12:06:00

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/19/sur-c … 8-3307.php
19 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Sur ces terres à l'écart

Loin est le temps où les gens de Biscarrosse étaient la risée de ceux de Parentis-en Born, comme le rapportent deux ou trois contes facétieux de Félix Arnaudin. « Los Parentís » se moquaient gentiment de ces « pés negues » (littéralement « pieds noirs ») de l'extrême ouest du Pays de Born pataugeant à longueur de temps dans la fange des marais ou vivant quasiment comme des sauvages dans les hautes dunes de la « Montanha ». C'est terminé. Voilà quarante ou cinquante ans, les uns ont failli devenir les rois du pétrole ; enfin, presque… Les autres se sont mis à vivre des retombées du militaire et du tourisme. Exit, en somme, la marginalité géographique.

La position de cette contrée sur le rivage aquitain, pareillement aux deux autres éléments de la trilogie côtière landaise (Marensin et Maremne, « pays maritimes »), renvoie en effet, par son nom même, aux zones un peu à l'écart. « Lo País de Bòrn » (forme gasconne) est donc la bordure, la bande de terre latérale et, ici, littorale.

Comme l'antique Losa sous les eaux de l'étang de Sanguinet et comme les rivages méridionaux du bassin d'Arcachon, le pays dit « de Born » coïncide en gros avec l'ancien territoire des Boii ou Boiates, tribu installée sur la côte entre Biganos et Saint-Julien « en Born » (Sent Julian de Bòrn), où elle voisinait avec les Cocosates. Le découpage épiscopal du IVe siècle, s'appuyant sur l'organisation ancienne du territoire, faisait de cette contrée une dépendance de l'archevêché de Bordeaux. Cela dura encore tout le Moyen Âge.
Le N qui fait de la résistance

Mais qu'en est-il de Parentis ? La paroisse est mentionnée « Pa- rentias » (reconnaissance de fief en 1274), « Parencias » dans les Rôles gascons en 1315 et… Paretis » en 1630 sur la Carte de Gudocus (le N fut sans doute victime de la surdité ou de la distraction du dessinateur de ce beau document de l'école cartographique flamande). Mais bien vite réapparaît la forme Parentis au fur et à mesure que se multiplie et s'étend la production des atlas et autres cartes administratives.

Le nom de cette localité appartient à une famille de toponymes représentée en domaine d'oc par Uchacq-et-Parentis, au nord de Mont-de-Marsan, Parenties dans les Pyrénées-Atlantiques (commune de Guinarthe près de Sauveterre de Béarn) et Parentignat (au sud d'Issoire, Puy-de-Dome). Bien loin de là, on trouve aussi Parenty (Pas-de-Calais). Les formes anciennes du Parenties béarnais (Paranthies en 1385, Paranthias en 1540…) rappellent les communes landaises. Le N tombant fréquemment entre deux voyelles dans la phonétique gasconne, s'y dissimule un « Parentinas (terras) », soit « les terres, la propriété de Parentinus. On ne sait évidemment pas où étaient exactement les biens fonciers de ce citoyen. Et, à notre connaissance, on n'y avait pas encore trouvé de l'or noir.


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#14 2010-08-22 12:07:22

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/20/nouve … 0-2708.php
20 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Nouveaux habitants de la bastide

Sauf votre respect, Labastide-d'Armagnac, ce n'est pas vraiment une ville, mais plutôt un lotissement.

- Lotissement ! Ce terme, aujourd'hui si courant, n'est-il pas chargé parfois de commisération voire de connotation négative, surtout quand on n'a pas trop d'égards pour l'environnement et le paysage ?

- Certes. Mais « la bastida », toutes proportions gardées, c'était comme « Résidence Truchmol » ou « Les Hauts de Tartampion sur Ourbise » ou, mieux, « Domaine de Ceci », plus classe… « Bastida » est le participe passé du verbe occitan « bastir » que le français a également emprunté. En ne lui laissant plus que l'accent dit « circonflexe », souvenir du « s » que les gosiers d'Outre-Loire ne prononcent plus depuis belle lurette, ou luette…

- C'est donc « celle qui a été bâtie » ?

- Exact. C'est banal, mais malgré tout intéressant. Le mot d'origine semble venir du germanique, « bastjan », ayant le sens de tresser ou, initialement, de « construire des fortifications entrelacées à l'aide de poteaux, autour d'un château ».

- On en trouve un certain nombre dans les pays occitans…

- Assurément. Au Moyen Âge, entre le milieu du XIIe siècle et la deuxième moitié du XIIIe, en Agenais, Quercy, Albigeois ou Lauragais, et bien sûr en Gascogne, une vague d'urbanisme planifié apparaît, celle des bastides. Près de 300 ont été identifiées dans le grand Sud-Ouest. Ces opérations d'aménagement cherchent à organiser des centres de peuplement et d'échanges commerciaux, accordent des libertés à ceux qui viennent s'y établir (los poblants) et marquent la puissance de leur promoteur, le comte de Toulouse, son sénéchal, le vicomte de Béarn ou bien le roi-duc, c'est-à-dire le souverain anglais suzerain d'une partie de l'Aquitaine. Pour ce faire, on prend des terres sur la forêt, on assèche au besoin des marécages ou on défriche la lande. Ce qui est amusant, c'est que Labastide-d'Armagnac, qui remonte à 1296 (contrat de paréage entre l'un des successeurs du comte de Juliac et Édouard Ier d'Angleterre) est primitivement baptisée « bastida de Boloygne », en 1305 dans les Rôles gascons.

- Comme Bologne en Italie ?

- C'est cela, oui… N'oubliez pas que comme nos résidences ou lotissements modernes, on attirait le colon avec un nom prestigieux : Plaisance, Barcelone ou Miranda/Mirande dans le Gers, Grenade, Valence… Ah ! le prestige espagnol de la Reconquista… Aujourd'hui, ne voit-on pas des Beverley, Hollywood ou Tahiti ?

- Et Armagnac ?

- Sous la forme Armeingnac en 1259, c'est issu du nom germanique Herimannus, combiné avec le suffixe - iacum (le domaine de). Il a dû désigner primitivement un domaine seigneurial. Toutefois, à Labastide-d'Armagnac, fameuse pour sa place carrée aux célèbres couverts (« cornièras » ou « garlandas » en gascon), on sait qu'il y a eu une occupation bien plus ancienne : la villa gallo-romaine de Gèu, probablement du IVe siècle. Avec ses pierres, on en fit une chapelle.

- C'est aujourd'hui le petit sanctuaire Notre-Dame des Cyclistes, n'est-ce pas ?

- Oui, depuis 1958 seulement, grâce à l'abbé Massie. Comme quoi, la roue tourne…


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#15 2010-08-22 12:08:23

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Re: Découvrir l'Histoire des Landes

http://www.sudouest.fr/2010/08/21/le-fi … 2-3396.php
21 août 2010 06h00 | Par Jean-Jacques Fénié
Le fief d'un lignage gascon

Un carrefour, des aménagements donnant un aspect plutôt pimpant aux lieux et un hôtel de ville qui veut en imposer : Labrit n'est qu'un assez modeste chef-lieu de canton en Haute-Lande, mais si l'Histoire avait voulu, la bourgade aurait pu devenir une cité d'importance, une véritable capitale. Pensez ! Une famille de petits gentilshommes gascons y prend racine au XIIe siècle. Bien installés dans leur château édifié sur la « motte » entourée de douves du lieu-dit Les Plantons, non loin du bourg, ils font prospérer et surtout agrandissent leur fief. Ils le font au gré d'alliances matrimoniales bien calculées, en rachetant des terres et, au besoin, en captant quelques héritages dans la période troublée de la lutte qui oppose le roi d'Angleterre, duc d'Aquitaine, au roi de France, qu'ils servent tour à tour selon leurs intérêts. Leur domaine s'étend aussi bien vers l'Océan que vers la Garonne qu'ils atteignent dès le milieu du XIIIe siècle.

Ce « lignage gascon » connaît donc un destin exceptionnel, du fait notamment de sa fusion avec la maison de Foix-Béarn. Le couronnement se réalise puisque ces Landais d'origine finissent par donner des rois de Navarre et de France. À commencer par Henri IV, tombé sous la dague de Ravaillac voilà exactement 400 ans. Il était le fils de Jeanne d'Albret (1528-1572), connue également pour avoir fait passer le Béarn à la Réforme.
Tendez l'oreille

Mais, au fait, Albret ou Labrit ? Comment se faire une religion ? Il faut comme toujours faire appel aux mentions anciennes et aux lois parfois curieuses de la phonétique qui sont bien souvent celles du moindre effort. Outre que les gosiers des bords de l'Estrigon et de la Gouaneyre ont dû avoir quelque difficulté à prononcer le germanique Liudbret à l'origine du toponyme, les copistes médiévaux ne disposaient pas de correcteur d'orthographe et, l'âge venant, pouvaient devenir malentendants… Tendez l'oreille, voici le déroulé.

Dès 1242, les précieux Rôles gascons font mention de la paroisse de « Lebret », qu'on latinise au gré « deus pergamins » (les parchemins, faits à l'origine en peau de Pergame). En 1316, on rencontre « n'Amanieu senyor de Labrit vescomte de Tartas » : c'est sans doute celui des fameuses peintures murales de la petite église de Lugaut, mais appréciez au passage la vieille particule honorifique occitane En ou Ena au féminin, synonyme de « Maître, Seigneur », qu'on retrouve sous forme toponymique un peu à Biscarrosse et à foison dans le Gers et le Toulousain.

Il est bien connu que les familles nobles choisissaient généralement des noms de baptême germaniques, héritage des Francs. Or, de Lebret à Le Bret puis Albret (en somme : « à Lebret »), voilà autant de formes orales nullement étymologiques mais qui révèlent que le vieux nom de baptême Liudbret était déjà tombé en désuétude… La loi du moindre effort, on vous dit. En espérant que cette ultime rubrique estivale vous aura converti à l'intérêt de la toponymie, « adishatz e bona rentrada » !


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